| Extraits   	de l'introduction de l'ouvrage " Présumé Jean MOULIN " - 2006 Voir la   	présentation de cet ouvrage sur notre site  par Jacques   	BAYNAC  Introduction   	  	 ....   	La situation s'est améliorée depuis une dizaine d'années. L'ouverture de   	fonds d'archives des années quarante a apporté quantité de données   	nouvelles. Même partiels, même expurgés, les dossiers des services   	américains, britanniques, français, suisses, complétés par les papiers des   	gouvernements de Londres et de Washington auxquels il faut ajouter ceux des   	administrations françaises concernées, nationales aussi bien que   	départementales, renouvellent, en dépit de l'absence des dossiers russes, la   	connaissance de l'époque.  A tel point que l'histoire de la France éclatée de   	ces années-là est à reconsidérer, à commencer par celles du gaullisme et de   	la Résistance. Quant à Moulin, si les (rares) ouvrages qui lui ont été   	consacrés sont ainsi largement devenus obsolètes, sa biographie peut enfin   	commencer à sortir des limites de l'esquisse et du schéma pour gagner en   	réalisme et en complexité. Sans toutefois que l'on puisse toujours franchir   	le cap des présomptions, des supputations et des interrogations.   	   	 Le dernier obstacle à surmonter par l'historien est d'ordre politique. Car   	la biographie de Moulin est un enjeu politique lourd, qui commande largement   	la lecture de l'après-guerre en France, jusqu'à la fin du pouvoir gaulliste   	et au déclin du parti communiste.  Laissée dans la pénombre pendant vingt   	ans, la figure du président du Conseil national de la Résistance, que même   	les procès faits à Hardy n'avaient pas propulsée en pleine lumière, est   	devenue celle de la Résistance tout entière en 1964.  Rien moins qu'innocent,   	le transfert de ses cendres supposées au Panthéon deux ans après la fin des   	spasmes de la guerre d'Algérie fut l'occasion choisie par le gaullisme de   	raviver sa geste un peu fanée pour mieux se poser en exclusive et permanente   	incarnation de l'unité nationale.  Tout l'artifice de l'oraison prononcée ce   	jour-là par André Malraux, lui-même entré en résistance au printemps 1944,   	fut d'ensevelir Moulin sous les fleurs d'une rhétorique douteuse afin de   	gommer les différences de nature qui, jusqu'à la mort de Moulin, avaient   	retenu les dirigeants de la Résistance de reconnaître le général de Gaulle   	comme leur chef idéologique et d'adhérer pleinement à son projet politique.   	   	 Apparent hommage à la Résistance et à Moulin, le discours du ministre   	gaulliste de la Culture fut en filigrane la négation de l'idéal   	révolutionnaire de la Résistance et le déni des efforts de Moulin pour   	prendre en charge cet idéal, le structurer, le mettre au monde et   	l'instituer.  La déclamation de Malraux (l'un de ses biographes, Olivier   	Todd, l'a bien vu) fut une souscription aux légendes fondatrices du   	gaullisme et aussi, faut-il ajouter, une trahison de Moulin inscrit dans   	l'Histoire non pour ce qu'il avait été vraiment mais pour ce que l'on   	voulait qu'il devînt.  Proclamé normalisateur de la Résistance, ce prétendu «   	désordre de courage » prêt à se déchirer « entre des tuteurs différents »,   	Moulin fut ainsi condamné à porter à jamais la livrée du gaulliste pur et   	dur.   	   	 Passé largement inaperçu des foules impressionnées par la grandiloquence du   	verbe malrucien, l'abaissement de Moulin au rang d'épigone ne laissa pas les   	initiés indifférents.  L Humanité regimba mezzo voce : Moulin était mort «   	non pas pour le gaullisme, mais pour que vive la France ». Plus incisif,  Le   	Midi libre arrondit quand même les angles en lâchant cette vérité première :   	Moulin était « de ceux qui refusaient de laisser confisquer la résistance   	par le gaullisme des services secrets et par le communisme métropolitain ».   	 Mais la manipulation historique .....   ...       |