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Anciens des Services Spéciaux de la Défense Nationale ( France ) - www.aassdn.org -  
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PAGES D'HISTOIRE & " Sacrée vérité " - (sommaire)
LES SERVICES SPÉCIAUX FRANÇAIS DANS LES CONFLITS D'OUTRE-MER 1945-1956 (1)
 

L'oeuvre des Services Spéciaux de la Défense Nationale ne s'est pas achevée avec la Deuxième Guerre Mondiale. A l'heure où notre Association s'ouvre aux générations d'après-guerre, il nous a paru indispensable que notre Bulletin donne une large place à des exposés ou des récits qui témoignent de leur continuité au service de la France et rendent hommage à leur action comme à leur esprit de sacrifice. Ainsi, déjà, notre Bulletin 139 s'associait à la D.P.S.D. pour honorer la mémoire de l'héroïque Georges Pradines de l'antenne de Sécurité Militaire de Dien bien phû, mort de ses horribles blessures le 9 juillet 1954.

Nous avons demandé à notre camarade le Colonel Daugreilh de bien vouloir ouvrir ce grand Chapitre de l'Histoire d'après-guerre des Services Spéciaux. Intimement attaché à notre Maison depuis l'occupation de la France par les nazis, il n'a cessé de servir, notamment en Indochine et en Algérie. Son précieux témoignage, enrichi par ceux de nombreux camarades qui ont bien voulu lui apporter leur concours, commence aujourd'hui par un rappel du Passé.

C'est la première partie de son travail que l'on peut intituler l'Empire dans la Tourmente ». Suivront une 2° partie L'Indochine et une 3° partie L'Algérie ».   Nous souhaitons vivement que cette « ouverture » au-delà de la Deuxième Guerre Mondiale suscite chez nos camarades le désir de témoigner. Ainsi s'enrichira le patrimoine historique des Services Spéciaux français et notre association pourra s'enorgueillir d'avoir une fois de plus servi cette Sacrée Vérité ».  

Paul PAILLOLE

 

LA FRANCE ET SON EMPIRE DANS LA TOURMENTE

par le Colonel Daugreilh

Note Liminaire

Pour nous c'était hier. Un simple retour en arrière nous amène à constater avec stupeur que le début des hostilités qui ont si fortement secoué notre pays remontera demain à un demi-siècle. Ainsi ont été engloutis notre jeunesse et la plus grande part de notre âge mûr.

La finalité de nos services réside dans le service total de la Nation, sans restriction ni état d'âme en s'adaptant au mieux aux différentes situations qui marquent les enchaînements de l'Histoire. C'est pour cette double raison qu'avant de traiter de l'après-guerre et spécialement de nos Services en Indochine, puis en Algérie, nous pensons utile de rappeler de façon succincte le calendrier des principaux événements de cette époque. Ce rappel intéressera les anciens en ravivant leurs souvenirs, et peut-être, comme nous le souhaitons ardemment, les générations plus jeunes qui n'ont pas vécu ces dures années marquées par le 2em conflit mondial.

 

LE FILM DES EVENEMENTS DANS LA SECONDE GUERRE MONDIALE

Préludes

1933   

- Prise de Pouvoir par Hitler. - L'Allemagne réarme dans l'indifférence des alliés.

1938   

- Elle envahit l'Autriche. Elle oblige la Tchécoslovaquie à lui céder le territoire des Sudètes avec l'accord de la France signé à Munich, de la Grande-Bretagne et de l'Italie.

1939   

- Hitler occupe la totalité de la Tchécoslovaquie et Mussolini l'Albanie.

- Signature du Pacte d'Acier créant l'Axe Berlin-Rome.

- Accord Germano-Soviétique.

- Invasion de la Pologne par les nazis et les Soviets.

- La France et la Grande-Bretagne déclarent la guerre à l'Allemagne le 3 septembre.

- La Pologne est écrasée. - Sur le front ouest, inaction militaire : c'est la « drôle de guerre ».

Le Front de l'Ouest :

1940   

- Paul Reynaud remplace Daladier et forme le dernier Cabinet de la IIIem République.

- Invasion allemande du Danemark et de la Norvège.            

- Débarquement Anglo-Français à Narvik (Norvège).

- Fin de la « drôle de guerre ».

- Invasion du Benelux.

- Le front français est percé entre Namur et Sedan.

- Capitulation de la Hollande.

- Remplacement du Général Gamelin par le Général Weygand.

- Reddition de la Belgique.

- Évacuation vers l'Angleterre des troupes franco-britanniques encerclées dans la poche de Dunkerque.

- Le front sur la Somme est rompu.

- Les Allemands entrent à Paris et poursuivent leur progression.

- L'Italie déclare la guerre mais échoue devant l'Armée des Alpes.

- L'ennemi est aux portes de Bordeaux où s'est réfugié le Gouvernement.

- La France demande l'Armistice.

- L'Armistice est signé à Rethondes le 22 juin en présence d'Hitler.

- La zone d'occupation couvre 45 % du territoire et la majeure partie de notre potentiel économique.

- 8 départements du nord et du nord-est sont déclarés zone interdite.

- L'Alsace-Lorraine est déclarée zone à Régime Spécial et sera annexée au Reich.

- « Une armée d'Armistice » limitée à 100.000 hommes nous est laissée avec d'insignifiants moyens logistiques.

- Les frais d'occupation sont énormes et révisables.

- Près de 2 millions de prisonniers resteront en captivité.

- Un armistice est signé à Rome avec l'Italie.

- L'Angleterre rappelle sa représentation diplomatique, saisit nos bateaux réfugiés dans ses ports, bloque notre Escadre d'Alexandrie, attaque Mers-el-Kebir où elle coule nos bâtiments au mouillage.

1.297 marins français sont tués.

- L'opération tentée contre Dakar est un échec.

- Hitler vaincu dans la bataille aérienne d'Angleterre renonce à son projet d'invasion de la Grande-Bretagne.

- Les troupes de Mussolini s'emparent de la Somalie britannique, pénètrent au Soudan et au Kenya, menacent l'Égypte et envahissent la Grèce.

- En Octobre 1940, une armée de 100.000 hommes est autorisée en A.F.N. Elle atteindra le chiffre de 127.000 à la veille du 8 novembre 1942 (Débarquement allié).

1941

- Mussolini vaincu sur mer en Afrique et en Grèce sollicite l'aide de Hitler.

- Les Anglais prennent Benghazi.

- Rommel débarque à Tripoli à la tête de l'Afrika korps.

- Parti du Tchad, le général Leclerc occupe Koufra et entreprend la conquête du Fezzan.

- Guerre éclair des nazis contre la Yougoslavie et la Grèce. Les Anglais sont chassés de Crète.

- Attaque de l'U.RS.S. par la Wehrmacht.

- Attaque surprise par le Japon de la base U.S. de Pearl Harbor.

La Grande-Bretagne et les U.S. déclarent la guerre au Japon.

- L'Allemagne et l'Italie déclarent la guerre aux U.S.A..

- Accords militaires franco-japonnais (Decoux-Tyo) La France Libre déclare la guerre contre le Japon.

- Échec de la Wehrmacht devant Moscou.

1942

- Nouvelle offensive allemande en direction du Caucase.

- Le Général Koenig vainqueur à Bir Hakeim. Montgomery vainqueur à El Alamein.

- Débarquement Anglo-Américain en Afrique du Nord.

- Les Allemands établissent une tête de pont en Tunisie pour recueillir l'Afrika korps et stopper les alliés.

- L'Armée française d'A.F.N. sous la conduite de Giraud reprend la lutte contre l'Axe.

- La Wehrmacht occupe la zone sud de la Métropole.

- L'Armée d'Armistice est désarmée et dissoute.

- Les Allemands attaquent Toulon. La flotte française se saborde.

- Darlan assassiné à Alger. Giraud Commandant en Chef civil et militaire.

1943

- L'Armée Paulus capitule à Stalingrad.

- Bataille de Tunisie. Les troupes Italo-Allemandes capitulent au Cap Bon.

- A Alger, constitution du Comité français de Libération Nationale (C.F.L.N.).

- Giraud et de Gaulle co-présidents.

- Débarquement en Sicile. - Mussolini déchu est interné par les Italiens fidèles au Roi. - Montgomery débarque en Calabre.

- Clark débarque à Salerne.

- Mussolini délivré par les Allemands constitue une République Sociale Italienne dans le nord de la péninsule.

- La Corse est libérée par les troupes françaises sous les ordres du Général Giraud qui abandonne toutes fonctions politiques au profit de de Gaulle.

1944

- Débarquement allié à Anzio (Italie centrale).

- Le Corps expéditionnaire français, sous les ordres du Général Juin, victorieux sur le Garigliano entre à Rome.

- Débarquement Allié en Normandie.

- La 1ère Armée française sous les ordres de De Lattre débarque en Provence avec les Américains, libère Toulon, Marseille et fonce vers les Vosges et l'Alsace.

- Paris insurgé est libéré le 25 août par la 2em D.B. Les Alliés poursuivent victorieusement leur avance vers le Nord et l'Est

1945

- Échec de l'offensive Von Rundstedt dans les Ardennes.

- La 1ère Armée française nettoie la poche de Colmar, franchit le Rhin, bouscule les Allemands en Forêt Noire, s'empare de Stuttgart et de Ulm ; franchit le cours supérieur du Danube, atteint la frontière autrichienne et fait sa jonction avec les Américains venant d'Innsbruck.

- Mussolini est exécuté par des partisans italiens.

- Hitler se suicide. L'Amiral Doenitz prend en charge ce qui reste de l'Allemagne.

- Berlin capitule et est occupé par l'Armée rouge.

- Le Général Leclerc est à Berchtesgaden.

- Le Général Jold signe à Reims le 7 mai la capitulation allemande,

- Le 8 mai l'acte général de Capitulation est signé à Berlin. Le Général de Lattre de Tassigny représente la France et signe en qualité de témoin.

 

LES CHOIX POLITIQUES DES FRANÇAIS DE 1939 A 1945

L'État Français

Le Maréchal Pétain, Président du Conseil, transporte son Gouvernement le 1er juillet 1940 à Vichy où le 10 juillet l'Assemblée Générale lui vote les pleins pouvoirs à une écrasante majorité.

Les États-unis d'Amérique et l'U.R.S.S. installent à Vichy leurs missions diplomatiques. L'Amiral William Leahy, ami personnel du Président Roosevelt occupera le poste d'Ambassadeur des U.S.A. de janvier 1941 à avril 1942.

Le Gouvernement est dominé par Pierre Laval, promoteur de la politique dite de collaboration.

Le Maréchal auréolé du prestige de Verdun, bénéficie d'un important courant de popularité. Secret, vieilli et soumis à de nombreuses et contradictoires pressions, il paraît osciller entre une attitude d'indépendance dans le cadre de la Convention d'Armistice et une politique de collaboration active avec l'Allemagne.

A la fin de 1940, il se débarrasse de Laval. Les Allemands l'imposeront à nouveau en avril 1942.

En septembre 1940, le Maréchal a nommé le Général Weygand Délégué Général en Afrique du Nord. Sous la pression allemande, il le rappellera en novembre 1941 et nommera le Général Juin commandant en Chef des Troupes en A.F.N.

 

Dans le cadre de la politique de collaboration, un certain nombre de mesures impopulaires sont prises par le Gouvernement de Vichy :

- Lois d'exception raciales et autres.

- Travailleurs « volontaires » désignés par l'Allemagne entre 1940-1942.

- Service du Travail Obligatoire (S.T.O.) à partir de juin 1942.

- Ouvriers réquisitionnés pour le service dans les usines ou dans certaines usines travaillant pour les Allemands.

- Main-d'oeuvre fournie à l'Organisation Todt.

- Création des Tribunaux d'exception de la Milice, etc...

 

Toutes ces mesures ont été prises dans un climat alourdi par les privations de toutes sortes, les restrictions imposées dans les domaines de la vie courante, les brimades de toutes natures et une répression de plus en plus brutale contre les patriotes.

L'opinion s'est progressivement détournée du Maréchal. Son immobilisme en novembre 1942, ainsi que les contraintes ajoutées à celles déjà imposées, vont complètement le déconsidérer tandis que la Résistance s'est structurée et s'est lancée dans une lutte implacable contre l'occupant.

Le Gouvernement de Vichy s'enfuit en Allemagne en août 1944.

Revenu en France après la capitulation allemande, le Maréchal Pétain est traduit en Haute Cour. Condamné à la peine capitale et gracié, il termine ses jours en captivité à l'Île d'Yeu en 1953.

Pierre Laval capturé en Autriche par les forces U.S. est remis par elles aux autorités françaises. Jugé et condamné, il est fusillé à Paris le 9 octobre 1945.

La France Libre

Le Général de Gaulle Sous-secrétaire d'État à la Défense Nationale dans le Gouvernement Paul Revnaud, hostile à l'Armistice, a gagné le 17 juin Londres d'où il lance son appel du 18 juin 1940.

Faisant une analyse différente de celle du Maréchal de la situation internationale et intérieure il annonce son intention de ramener le pays au combat en utilisant les atouts qui nous restent : l'Empire et la Marine.

Compte tenu de la conjoncture du moment, ce choix ressemble à une gageure ou au mieux à un incroyable acte de foi. Son appel n'a réussi ni à empêcher la signature de l'Armistice ni à rallier les responsables civils et militaires de nos possessions d'Outre-Mer. Il n'a avec lui qu'une force armée dérisoire et l'affaire de Mers-el-Kébir a momentanément tari son recrutement.

Si le Président Roosevelt le considère avec méfiance et s'efforce de trouver d'autres interlocuteurs français, Winston Churchill lui apporte un soutien jamais démenti en dépit des violents différents qui opposeront à plusieurs reprises les deux hommes. Inlassablement, De Gaulle organise et renforce ses moyens. Il constitue une force où les Trois Armées, Air, Terre Marine sont présentes et la réinsère progressivement dans la lutte contre l'Axe, notamment en Afrique. Il obtient les ralliements successifs des possibilités accrues, des Terres de souveraineté et une capitale temporaire  Brazzaville.

Reconnu par les Britanniques en tant que Chef des Français Libres, il s'efforce d'élargir son assise politique. Il crée sous sa Présidence :

- Le Conseil de Défense de l'Empire (octobre 1940).

- Le Comité National de la France Combattante (septembre 1941)

 

Après le débarquement du 8 novembre 1942 en A.F.N. et l'éviction de Darlan, de Gaulle gagnera Alger où le 30 mai 1943 sera créé le Comité Français de Libération Nationale ( C.F.L.N. ) co-présidé avec le Général Giraud qui sera progressivement évincé.

Le 3 juin 1944, il deviendra Président du Gouvernement Provisoire de la République Française (G.P.R.F.) qui sera assisté par une Assemblée Consultative Provisoire.

Indépendamment de Londres et des F.F.L. des mouvements de Résistance Intérieure sont nés en France même. Très minoritaires encore en 1941, ces mouvements prendront de l'ampleur au fur et à mesure que l'opinion se détournera du Gouvernement de Vichy.

Le 31 décembre 1941, le Général a fait parachuter en Provence le Préfet Jean Moulin avec mission de recenser les divers mouvements existant en zone sud, de tenter de les unifier et de les rallier à la France Libre.

Après un deuxième passage à Londres, Jean Moulin revient en métropole avec mission de mettre sur pied un organisme commun à toutes les fractions de la Résistance intérieure. Ainsi une Armée Secrète unifiée sous le Commandement du Général Delestraint est instituée et le Conseil National de la Résistance (C.N.R.) se réunit pour la première fois à Paris en mai 1943. Il reconnaît le Général de Gaulle comme son Chef politique.

Après l'arrestation de Jean Moulin en juin 1943, Georges Bidault accède à sa Présidence jusqu'à la Libération.

Le Général de Gaulle rentre le 25 août 1944 dans Paris libéré où il est rejoint par le G.P.R.F. Le C.N.R. est dissous.

Il fait élire au Suffrage Universel le 21 octobre 1945 une Assemblée Constituante qui le confirme dans ses fonctions de chef du Gouvernement. Le G.P.R.F. est reconnu officiellement par les alliés le 23 octobre 1945.

En janvier 1946, le Général de Gaulle en désaccord avec les partis politiques qui ont retrouvé leur combativité et leurs divergences quitte le Gouvernement et le pouvoir.

Les Services Spéciaux Français

Le 25 juin 1940, le Colonel Rivet, Chef des Services Spéciaux traditionnels (S.R. et C.E.) groupés au sein du 5ème Bureau de l'E.M.A., décide de tourner les conventions d'Armistice imposant la dissolution immédiate de ces Services.

L'action contre l'adversaire sera poursuivie clandestinement.

Il organise son P.C. à Royat sous la couverture de « l'Office du retour à la terre ».

Le Lieutenant-colonel Perruche s'installe à Vichy et avec le Commandant Navarre crée le réseau de Renseignements KLÉBER. Il sera officiellement reconnu FORCES FRANÇAISES COMBATTANTES à la date du 1er juillet 1940.

Le Commandant Paillole installe clandestinement son P.C.. à Marseille et organise le réseau de Contre-espionnage S.S.M./F./T.R. sous la couverture de la Société des Travaux Ruraux. Ce réseau sera officiellement reconnu FORCES FRANÇAISES COMBATTANTES à la date du 1er juillet 1940.

L'action de ces deux réseaux (ainsi que celle de l'Organisation de camouflage des Armes : C.D.M. ) sera protégée et éventuellement prolongée par les Bureaux des Menées Antinationales ( B.M.A. ) que dirige le Colonel d'Alès depuis Royat.

Des contacts secrets sont maintenus avec les Britanniques auxquels sont transmis les renseignements recueillis. Les liaisons sont facilitées grâce à la complicité des diplomates U.S. et Canadiens en poste à Vichy.

Les liaisons clandestines radios avec l'I.S. sont rétablies dès juillet 1940. Les Français de Londres s'organisent également.

Le 1er juillet 1940, le Capitaine Dewavrin, retour de Norvège, se voit confier les 2ème et 3ème bureaux de l'État-major du Général de Gaulle. Profane en matière de Renseignements, Dewavrin constitue une petite équipe d'officiers néophytes comme lui. Il reçoit des Services Britanniques une formation accélérée avant de conclure avec eux un accord de coopération. L'I.S. donnera son concours matériel à l'organisation gaulliste. Il recevra en échange, notamment sur le plan de la recherche des renseignements en France occupée, le fruit du travail du 2ème Bureau des F.F.L.

De la rencontre de Dewavrin devenu « PASSY » avec Gilbert Renault, évadé de France » qui devient « REMY » naît en novembre 1940 le premier réseau de renseignements de la France Libre connu sous le nom de : « Confrérie Notre-Dame ». Il bénéficiera du concours d'agents T.R. travaillant en Z.O.

En avril 1941, le 2ème Bureau des F.F.L. prend l'appellation de « Service de Renseignements ».  Il s'étoffera au début de 1942 d'une branche C.E. créée par le Lieutenant Warin dit " WYBOT " ancien des Bureaux M.A.

En janvier 1942, cet organisme devient Bureau Central de Renseignements et d'Action Militaire (B.C.R.A.M.) puis plus simplement B.C.R.A. en juillet 1942 après que l'organisation de l'action en France occupée lui ait été confiée.

 

En Métropole les Bureaux M.A. sacrifiés sur l'autel de la collaboration sont dissous en août 1942. Ils sont en fait remplacés par un Service de Sécurité Militaire clandestin dont la direction est confiée au Commandant Paillole qui rejoindra Alger en janvier 1943.

Le T.R., poursuit ses activités clandestines en Métropole sous la houlette du Capitaine Lafont alias Verneuil, officier ancien et chevronné de notre S.R. Le Réseau Kléber, également rattaché à Alger, est successivement sous les ordres du Commandant Bertrand, puis du Capitaine Lochard.

En avril 1944, en Algérie, l'ensemble des organismes français de Renseignements de C.E. et d'Action, Services traditionnels et B.C.R.A. sont groupés au sein de la Direction Générale des Services Spéciaux (D.G.S.S.) rattachée au Chef du Gouvernement Provisoire, Chef des Armées, sous l'autorité de Jacques Soustelle.

Le Général Rivet est évincé.

Le Commandant Paillole est confirmé dans ses fonctions de Directeur de la Sécurité Militaire et de Chef du C.E..

Le Commandant Simoneau devient Chef du Service de Renseignement Opérationnel ( S.R.O. ). Il sera rattaché à la 1ère Armée Française.

Après la Libération de la capitale, les Services suivent le Gouvernement et regagnent Paris.

La question de leur organisation va être vite posée. Elle soulèvera de nombreux problèmes tant en ce qui concerne leur structure et leur fonctionnement que sur le plan des personnes.

Soustelle se retire, la D.G.S.S. est supprimée le 17 novembre 1944 et remplacée par la Direction Générale des Etudes et Recherches ( D.G.E.R. ) placée sous l'autorité du Colonel Passy.

La branche C.E./S.M. est démantelée et entraîne la démission du Commandant Paillole opposé au fonctionnement des Services de Sécurité et de C.E. en temps de guerre.

- Le Préventif reste à la Sécurité Militaire, rattachée au Ministère de la Guerre dans un 5ème Bureau dirigé par le Colonel Labadie ;

- L'Offensif constitué par l'ancien T.R. ira avec son important fichier à la D.G..E.R, rattachée à la Présidence du Conseil ;

- Le Répressif reviendra au Ministère de l'Intérieur par la Surveillance du Territoire reconstituée sous l'autorité de Wybot.

Aux Armées, les détachements des Services Spéciaux ( S.R.O.- S.M.-T.R. ) ne sont pas touchés par cette réorganisation et fonctionnent normalement.

La guerre continue.

A peine née, la D.G.E.R, est violemment attaquée et critiquée pour son recrutement pléthorique et anarchique, pour ses actions et procédés incontrôlés et souvent illégaux, pour ses largesses financières et ses moyens exorbitants.

Rapidement déconsidérée, elle est dissoute et remplacée le 28 décembre 1945 par le Service de Documentation Extérieure et de Contre Espionnage ( S.D.E.C.E.. ) que dirigera Henri Ribière à partir du 26 février 1946.

Le S.R. Colonial

Avant la Guerre, la recherche du Renseignement dans nos colonies et territoires d'Outre-Mer était assurée par des « organismes adaptés » (1). La protection rentrait dans les attributions des sûretés locales.

En 1937, le Ministre des Colonies, Marius Moutet s'inquiète de la poussée japonaise envers les mers du Sud et des agissements des Allemands en direction de l'Afrique Noire. Il décide de créer un 2ème Bureau des Colonies avec un Service de Renseignement Intercolonial (S.R.L). Il fonctionnera en parallèle et en liaison avec les Services Spéciaux de la Défense Nationale. (2ème Bureau S.R.-S.C.R.). La Direction en est assurée par le Colonel Nyo avec pour adjoint le Capitaine Salan.

En 1938, Georges Mandel qui succède à Moutet dans le Gouvernement Daladier renforce le dispositif en place par la création de l'État-major Général des Colonies avec à sa tête le Général Bührer qui siège également au Comité de Défense.

Le Colonel Nyo étant affecté à Dakar est remplacé par le Colonel Le Bris et le Commandant Salan, prend en charge le S.R.I. que devient progressivement « Service de Renseignements Impérial ».

L'organisation de ce Service est articulé en 8 secteurs de recherches : Shangaï, Hanoï, Nouméa, Djibouti, Tananarive, Dakar, Brazzaville et Fort-de-france qui se répartissent les parties sensibles du monde à l'exception de l'Europe et de l'Amérique du Nord.

Nous retrouverons le S.R.I. en Indochine entre 1940 et 1945.

L'Empire français dans la tourmente

« La France ce n'est pas seulement ces 550.000 km²  où les Français se sentent chez eux, c'est aussi l'Empire, gloire et fierté de la III em République. » ( Claude Paillat ) (2).

Le même auteur poursuit :« Après les heures de liesse, au moment où la guerre se termine, les Français se retrouvent pleins d'amertume (....) Or, dans les territoires d'Outre-Mer, rassemblés sous les plis du drapeau tricolore, les dissensions intérieures des Français et l'affaiblissement qui résulte des divisions, suscitent et réveillent bien de espoirs attisés par des Agents divers. N'y a-t-il pas là une occasion à saisir pour échapper à la tutelle de la France ?

Des craquements se sont manifestés que vont suivre de plus sinis­tres... »

On ne saurait mieux décrire l'évolution de la situation qui va se développer dans ces terres lointaines.

En 1940, l'Empire colonial sort indemne de notre désastre. Il reste notre recours. Jalousement contrôlé par le Gouvernement de Vichy, il sera un objectif important pour la France Libre dont les efforts vont tendre à le remettre dans la guerre.

Dans ce contexte l'Indochine Française constitue un cas particulier.

La présence japonaise infiltrée insidieusement dès 1940 se montre progressivement très envahissante. Elle interdit tout changement d'allégeance politique.

Finalement le brutal coup de force japonais sur l'Indochine le 9 mars 1945 supprimera « provisoirement » ce pays de la carte de nos possessions.

Au fil des jours d'autres colonies et territoires d'Outre-Mer se sont spontanément rangés aux côtés de la France Libre dès 1940. Ce sont :

Les Nouvelles-Hébrides et la Côte-d'Ivoire en juillet, le Tchad, le Cameroun et la Polynésie française en août, Les Établissements français de l'Inde et la Nouvelle Calédonie en septembre, enfin le 6 novembre le Gabon.

D'autres territoires se rallient par la force des armes :

- En 1941, le 27 juillet, les Territoires sous mandat de la Syrie et du Liban.

- Le 24 décembre Saint-Pierre-et-Miquelon occupés par les F.N.F.L. (malgré l'opposition des U.S.A. ).

 

Après le débarquement allié du 8 novembre 1942 en A.F.N., le Comité Français de Libération Nationale, puis le Gouvernement Provisoire de la République Française réussiront à placer sous leur contrôle l'ensemble de nos possessions d'Outre-Mer à l'exception de l'Indochine dont la situation a été exposée ci-dessus.

Cependant, sous la pression de ses alliés et notamment des U.S.A. le G.P.R.F. va devoir prendre en compte l'important courant qui se développe à travers le monde contre l'esprit même de la colonisation.

Conscient de cette évolution, le Général de Gaulle réunit du 30 janvier au 8 février 1944 la conférence dite de Brazzaville. Elle aura mission d'étudier les bases possibles d'une nouvelle politique coloniale.

Écartant toute possibilité d'évolution hors du bloc de l'Empire français et rejetant toute idée d'autonomie ou de droit à l'indépendance, « l'esprit de Brazzaville » exprime la volonté de transformer l'ancien système colonial en quelque chose d'autre, plus libéral et plus ouvert, dont la forme reste à déterminer.

Cette idée bien que généreuse ne résistera ni à l'épreuve du temps ni à la pression des événements. Elle ne recevra jamais un début de concrétisation.

En ce printemps 1945, la France enfin libérée commence une lente convalescence. Elle reste tributaire des Alliés qui ont bien voulu l'associer à leur victoire.

Son Gouvernement est confronté à de graves problèmes de structure : Restauration de l'État et reconstruction de notre Économie mise au pillage par l'occupant. Les Français de Métropole toujours soumis à de sérieuses restrictions s'efforcent de surmonter leurs difficultés journalières c'est assez dire que pour la plupart, ils ont l'esprit peu ouvert à la solution des problèmes impériaux.

D'autres, par contre, y songent et bien sûr au mieux de leurs propres intérêts.

En Asie les indépendantistes Indochinois sont soutenus et poussés par les Japonais, maîtres absolus du pays et par les Chinois qui aspirent à le devenir. Après la capitulation de leur pays le 14 août 1945, les Japonais vont faciliter l'installation à Hanoï d'un Gouvernement révolutionnaire Annamite qui proclame le 2 septembre la République et l'Indépendance.

Après l'échec des pourparlers, une guerre de longue durée débute le 19 décembre 1940. Elle immobilisera d’importants moyens Militaires prélevés principalement en Afrique du Nord et sur d'autres territoires où ils feront cruellement défaut. Les hostilités ne s'achèveront qu'en juillet 1954 avec les accords de Genève.

En Afrique le monde musulman a été très travaillé par les Agents de l'Axe. De sérieux problèmes ont été soulevés en 1941, 1943 et 1945 en Syrie et au Liban avec les Britanniques.

De leur côté, les Américains sont plus particulièrement attirés par le Maroc où ils ont engagé un flirt assez poussé avec les milieux nationalistes.

C'est au Maghreb que se feront entendre les premiers craquements annonciateurs du démembrement puis de la perte de cette portion d'Empire. C'est le test incontournable de la fin de notre prestige et de notre rétrogradation en tant que grande puissance.

Le Maroc a ouvert la série en janvier 1944 avec la publication du Manifeste du Parti de l'Indépendance qui a reçu l'approbation du Sultan. Dès lors les troubles, soutenus à l'origine par l'Abwehr avec la complicité espagnole, ne s'arrêteront plus. Chassés croisés politiques, émeutes sanglantes, actes terroristes, déposition, puis retour du Sultan, succession de Résidents Généraux, telle va être l'existence troublée du Maroc jusqu'à la reconnaissance de son indépendance le 3 mai 1956.

En Tunisie, pays de protectorat, l'agitation pour l'indépendance a eu pour origine la formation du Neo Destour par Habib Bourguiba en 1934. Elle donne lieu avant la Deuxième Guerre mondiale à plusieurs émeutes rapidement maîtrisées. En 1950, le Bey constitua un gouvernement où entra l'un des Chefs du Neo Destour.

En 1951, l'arrestation de Bourguiba entraîna des mouvements de résistance armée avec la participation du Syndicat des travailleurs tunisiens.

Le 3 juin 1955, le Gouvernement français accorda l'autonomie interne à la Tunisie et le 20 mai 1956 reconnu son Indépendance.

En Algérie les groupes nationalistes soutenus par l'Abwehr dès 1940 vont provoquer des troubles graves et sanglants à Sétif le 8 mai 1945, alors que la victoire est fêtée à Alger. Ils sont énergiquement réprimés. Le problème algérien est dès lors posé dans toute son ampleur. Le 1er novembre 1954, il prendra un tour sanglant et révolutionnaire qui s'achèvera par l'indépendance de l'Algérie proclamée le 1er juillet 1962.

Madagascar. - Le 30 mars 1947 éclatent de façon soudaine des émeutes sanglantes qui vont entraîner une sévère et longue répression. Là aussi le cycle infernal est  enclenché.

La lutte pour l'indépendance ne prendra fin qu'en 1958 quand ce territoire deviendra République autonome au sein de la nouvelle communauté française.

Il n'acquerra sa pleine souveraineté qu’en 1960. Un soulèvement militaire l’agitera encore en 1972 et il deviendra « République Démocratique » en 1975.

 

Depuis 1960 à l'exception des Départements et Territoires d'Outre-Mer la quasi-totalité des États d'Afrique Noire francophone ont choisi l'indépendance. Ils ne restent liés à la France que par des accords de coopération.

Les tentatives nées de « l'esprit de Brazzaville » de substituer à l'ancien système colonial un grand ensemble unissant la Métropole à ses anciennes possessions d'Outre-Mer sont demeurées vaines. Il en est ainsi de l'Union Française inscrite dans la Constitution de 1946 et de la Communauté Française inscrite dans la Constitution de 1958.

L'Empire Français, salvateur mais démodé a vécu. Nous pouvons pourtant être fiers de notre oeuvre.

Écoutons ce qu'en dit l'une des personnalités les plus qualifiées de cet ex-Empire Colonial, le Président Houphouet-Boigny :

« La Colonisation n'a pas été un mal en soi. « Qu'était en effet la Côte-d'Ivoire avant elle ? 60 tribus qui ne se connaissaient pas, s'entretuaient, n'ayant même pas le même dialecte. « Grâce à la colonisation, elles ont finalement trouvé leur unité et forment aujourd'hui, grâce à la France, une Nation. Ainsi la Gaule a-t-elle pu être autrefois unifiée et civilisée par Rome. »

(1) Mémoires du Général Salan, « Fin d'un Empire », tome 1.

(2) Vingt ans qui déchirèrent la France, « Le Guêpier », tome 1.

 

 

 

 
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Article paru dans le Bulletin N° 139

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