Une grande joie et un grand honneur pour notre Association : M. Pierre MONDANEL a reçu les insignes de commandeur de la Légion d’Honneur

L’historique court de l’Hôtel de Ville de PONT-DU-CHATEAU servait de cadre, samedi 24 Mars 1973, à une cérémonie en l’honneur d’un illustre enfant du pays, M. Pierre MONDANEL, Directeur honoraire au Ministère de l’Intérieur, ancien résistant, ancien déporté, Délégué Régional de l’ASSDN., à qui l’on allait remettre les insignes de Commandeur de la Légion d’honneur.

De nombreuses personnalités s’étaient donné rendez-vous pour apporter leur témoignage d’estime au nouveau promu. MM. BOULAY, député, président du Conseil Général ; PETIT, Secrétaire général de la Préfecture, représentant le Préfet de région ; le Colonel de GALEMBERT, commandant le B.A. 745 ; le Chef d’escadron NATALI, Adjoint au commandant du Groupement de Gendarmerie du Puy-de-Dôme ; CAMBE, Commissaire divisionnaire de la Police judiciaire ; BRIGE, Directeur inter­départemental, et BONAFOUS, Chef du Service départemental de l’Office des A.C.V.G. ; FLEURY, Secrétaire général du Rectorat, représentant M. HABY ; le Colonel PAILLOLE, Président National de l’A.A.S.S.D.N. ; Pierre CHENEVIER, Président de la Fédération des Amicales des Réseaux de la France Combattante, et le Colonel BOITTE, de l’A.A.S.S.D.N. (tous deux parrains du décoré) ; Robert HUGUET, Compagnon de la Libération ; BAC, LALLEMAND, et de nombreux déportés ; plusieurs Conseillers généraux et Maires étaient accueillis par M. Jean ALIX, Maire de PONT­-DU-CHATEAU, entouré de ses Adjoints et Conseillers municipaux.

La Cérémonie du 24 Mars 1973

Autour du perron de l’Hôtel de Ville, sur lequel allait se dérouler la cérémonie, on remarquait une délégation de l’A.A.S.S.D.N., les membres des Associations locales d’Anciens Combattants et Victimes de guerre et leurs drapeaux ; différentes organisations locales, etc… Le public ceinturait l’enceinte de la place pour suivre la cérémonie.

Avant de procéder à la remise de la décoration, M. Pierre CHENEVIER prononça une émouvante allocution. Après avoir souligné tout le plaisir et l’honneur qu’il avait de décorer un ami de vieille date, il tint à évoquer longuement la carrière exceptionnelle et les brillants états de service dans la Résistance de M. Pierre MONDANEL. « Non content de vivre l’Histoire, vous l’avez écrite !». II salua ensuite avec émotion la mémoire de Madame MONDANEL, décédée des sévices de la Gestapo lors de l’arrestation de son mari. Puis, après avoir prononcé la formule rituelle, il fixa la cravate de Commandeur de la Légion d’honneur autour du cou de notre prestigieux Délégué régional.

Allocution de M. Jean ALIX, le 11 Septembre 1972

« Monsieur le Directeur,

« Je saluerai tout d’abord l’enfant de PONT-DU-CHATEAU, d’origine paysanne modeste, l’adolescent travailleur, studieux, sportif aussi. Les anciens de la Jeune Gaule s’en souviennent. Mais ce que l’on connaît de vous maintenant, c’est le retraité de la Place aux Echalas, dont le temps se partage entre la recherche historique, l’amitié et le jardinage.

« Vous avez comblé PONT-DU-CHATEAU en lui donnant l’histoire qu’il méritait bien. Vous avez retracé les portraits de DULAURE, des Frères BROSSON, le Conventionnel et les Self Made Men du XIXem siècle, maîtres de l’Allier, dont les barques, partant du port de PONT-DU-CHATEAU, portaient à PARIS des pierres de VOLVIC et les moissons de LIMAGNE.

« Vous êtes le Président fondateur de l’Association des Amis du Vieux PONT- DU-CHATEAU, dont le riche Bulletin annuel vous doit tant.

« Vous avez donné au Bureau d’Aide Sociale de notre ville vos droits d’auteur et vous savez qu’une part importante de ceux-ci ont contribué au financement du Centre Aéré de MONTMORIN.

« Si nos compliments vont à l’historien, notre admiration va à Pierre MONDANEL, Directeur au Ministère de l’Intérieur. Pierre MONDANEL qui ne se contentait pas d’écrire l’histoire mais qui la faisait.

« Monsieur le Directeur, lors de nos premières rencontres, je vous ai taquiné avec l’affaire Prince et vous avez bien voulu m’ouvrir votre registre secret des confidences. Vous avez su me passionner, au travers de l’affaire Prince, de l’affaire Stavisky et sur toute une époque que vous avez vécue et marquée de votre action prestigieuse.

« Vous avez été au coeur de tous les événements qui ont marqué l’avant-guerre. Vous me permettrez de rappeler encore l’assassinat de MARSEILLE. Vous étiez le collaborateur direct du président BERTHOIN. J’ai relu avec intérêt l’hommage que vous décerne VLADETA MILICEVIC dans son ouvrage consacré à l’assassinat d’Alexandre Ier et du Président BARTHOU.

Vous-même écrivez à Milicevic, après l’arrestation des Oustachis : « Nous venions ainsi, vous vous en souvenez, de vivre ensemble des heures fiévreuses et passionnantes. La satisfaction que nous donnaient, dans l’intérêt de la vérité les premiers et fort remarquables résultats obtenus, les nouvelles, perspectives entrevues pour déceler et établir les hautes responsabilités encourues à l’étranger nous faisaient oublier la fatigue et les heures de sommeil qui nous manquaient. Les uns et les autres, nous sentions l’importance internationale de notre travail. »

Pour votre souci « d’apporter au tribunal de l’Histoire les premières preuves des manoeuvres occultes internationales se trouvant à l’origine de l’attentat », vous combattiez le fascisme qui allait s’étendre sur l’Europe puisque vous, aviez déterminé le rôle de PAVELITCH qui bénéficiait du total appui et de la complicité de MUSSOLINI. MUSSOLINI qui devait nommer PAVELITCH Gauleiter de CROATIE. PAVELITCH dont la domination dura trois ans et coûta au peuple Serbe 600.000 vies humaines.

Vous aviez déjà choisi en 1934 de combattre la montée de l’hitlérisme et du fascisme.

Je relisais récemment KAPUT de CURZIO MALAPARTE et, dans le portrait hallucinant de PAVELITCH ouvrant une bourriche qui, au lieu de contenir des huîtres, était garnie d’yeux humains, je pensais à vous, Monsieur le Directeur, qui fûtes certainement un des premiers français à voir de près la bête qui allait ronger l’Europe pendant si longtemps.

C’est le « Journal Officiel » de Janvier 1938 qui publie votre nomination dans l’Ordre de la Légion d’honneur, à titre exceptionnel, cette distinction vous récompensant pour les services rendus d’ans les affaires Stavisky, Prince, dans l’enquête sur le complot de la Cagoule. Le « Journal Officiel » de cette même date annonçait votre nomination à la tête de la Sûreté Nationale. C’était le jour où Hitler inaugurait, dans les Alpes Bavaroises, une nouvelle école de Chefs, où seuls les enfants robustes et d’une hérédité irréprochable devaient être admis. Les porteurs de lunettes en étant exclus.

Monsieur le Directeur, outre votre action implacable qui a permis l’échec du complot que l’on connaît sous le nom de la Cagoule, vous avez été aussi le haut fonctionnaire spécialiste de droit pénal international, représentant la France à HELSINKI, BELGRADE, BERLIN, NEW YORK et surtout GENEVE.

Vous m’avez souvent rappelé votre action auprès de Marx DORMOY, de même que votre admiration pour Léon BLUM. Vous avez su évoquer leur angoisse qui était aussi la vôtre.

Devant la montée du péril, vous avez connu la douleur de la défaite et, je sais, par une confidence que vous permettrez sans aucun doute, en ce jour, de révéler que vous étiez de ceux qui devaient partir pour LONDRES, de sorte que votre républicanisme est coté par Jules MOCH auquel vous avez permis une sortie discrète du Casino de VICHY où les pleins pouvoirs venaient d’être votés au Maréchal PETAIN.

Le Général RIVET écrit à votre propos :

« La grande épreuve de l’occupation et les courants « collaborateurs, »qui traversèrent notre politique à cette époque trouvèrent ce fonctionnaire égal à lui-même et fidèle aux grandes consignes de la résistance à l’ennemi. MONDANEL à VICHY est resté MONDANEL de la place Beauveau, accroché à l’ennemi de notre Pays, lucidement entêté à le combattre.

« Il ne convient pas dans le cas MONDANEL de glaner et d’éplucher des faits. Il a fait son métier. Et les actes qui l’honorent étaient de tous les jours. Inversement, je crois, ce serait peine perdue que de rechercher l’acte qui ne fut pas droit, intégralement Français. »

« Pour me résumer, ma conviction est celle-ci :

« 1° MONDANEL est un fonctionnaire de grande classe qui domine nettement tous ceux qui j’ai connus dans les fonctions que lui-même a occupées ;

« 2° II a fidèlement servi aux côtés de ses camarades de la Guerre engagés dans la lutte contre l’Allemand. Pas de défaillance, jamais d’attitudes équivoques. Mais l’acceptation courageuse des tâches que nous lui demandions ;

« 3° A VICHY, il a résolument joué sa carrière et aussi sa vie – pour rester dans le rang de ceux qui mettaient la libération du Pays, au-dessus des ambitions personnelles et des intérêts les plus légitimes, intransigeant dans son patriotisme, il n’a pas transigé avec le devoir. »

« A vous qui ainsi avez fait l’Histoire, je voudrais renouveler les témoignages d’affection et d’admiration de notre collectivité castelpontine en relisant votre conclusion de « PONT-DU-CHATEAU A TRAVERS LES AGES ». Vous vous adressez aux jeunes vous qui avec su le rester magnifiquement – et leur dites :

« Je ne doute point que vous ayez pour votre petite patrie, pour « cette terre où vous attachent tant de liens d’affection, cet amour fier et passionné des enfants pour leur mère, cet orgueil du paysan d’autre­« fois pour son village qu’il entretenait par le récit des vieilles légendes « dont beaucoup restent à conter. »

« Votre légende – pardon, votre vérité – il fallait bien l’amorcer davantage aujourd’hui, en cette journée qui est la vôtre, et si des jeunes, demain, doivent compléter l’histoire de PONT-DU-CHATEAU, c’est certainement au travers de votre histoire qui nous honore tous, qu’ils devront le faire. »

Prenant à son tour la parole, le Colonel PAILLOLE apporta à M. Pierre MONDANEL le témoignage d’affection et de reconnaissance des Anciens des Services Spéciaux de la Défense Nationale :

« L’oeuvre que vous avez accomplie est de celles qui méritent hautement la décoration que vous avez reçue. Et pour l’exemple que vous avez donné, c’est avec une grande émotion et une grande admiration que je vous dis merci. »

Enfin, M. MONDANEL, dans un discours de remerciement improvisé, sut avec le talent oratoire que nous lui connaissons à la fois charmer et émouvoir l’assistance.

Il exprima tout d’abord, en termes choisis, sa gratitude àà tous ceux

qui avaient pris part à cette cérémonie ; au Maire et au Conseil Municipal qui avaient tenu à donner un éclat exceptionnel à l’événement et à lui offrir le Croix de vermeil qu’il portait; au Colonel PAILLOLE, â M. CHENEVIER, à ses amis HUGUET, LALLEMAND, BAC, etc… Il adressa ensuite une pensée émue aux Résistants tombés les armes à la main, à ceux qui étaient morts sous la torture, à ceux qui avaient disparu en camp de concentration.

« Je reporte sur PONT-DU-CHATEAU et sur mes parents tout le mérite de la distinction que je reçois aujourd’hui ». Appréciant à sa juste valeur la manifestation de sympathie des Castelpontins, il concluait : « C’est le plus grand honneur qui pouvait m’être fait et à chacun j’adresse un cordial merci ». Ce merci, il devait le réitérer à l’intention de l’enfant lui offrant, au nom de ses jeunes camarades, une superbe reproduction de la Croix réalisée par leurs soins.

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