Notre Président National vient de recevoir du général MARTY, la lettre ci-après, que nous reproduisons in-extenso. Peu à peu, l’explication de notre désastre de Sedan se dessine…, tandis que la VÉRITÉ sur le rôle de nos Services commence à percer les ténèbres si souvent volontairement et tendancieusement entretenus.

” Mon Cher Président,

Duloir m’a prêté votre n° 94 du bulletin des anciens des Services Spéciaux. J’y trouve la controverse sur le ” 10 mai 1940 ” et je suis en mesure de vous apporter une information personnelle qui renforce votre position.

Affecté, fin janvier 1940, à l’E.M. de Montry, j’étais l’otage du 2ème Bureau à la section d’études du front N.-E. ( je venais du 2ème Bureau de La Ferté sous Jouarre où j’avais jour après jour, rédigé le bulletin d’information du G.Q.G. que je faisais signer au général Roton ).

Fin avril, j’ai été chargé d’étudier l’hypothèse suivante : Hitler envahit la Belgique et la Hollande, avec un effort principal sur Sedan. ( J’imagine aujourd’hui que cette étude avait été provoquée par vos renseignements du 12 avril sur la vraisemblance d’une attaque par les Ardennes ).

Le problème est simple: on connaît de façon très satisfaisante le dispositif allemand ( voir ouvrage de Gauché ). La masse des forces est déployée au nord de la Moselle. Le gros des unités blindées en fait partie.

Un axe principal d’effort en direction de Sedan est tout à fait logique. Son offensive dans ce secteur ne trouvera pas d’obstacle sérieux. Les forces belges au contact se replieront vers la Meuse et Bruxelles. La 5ème Division légère de cavalerie ( à cheval ) ne pourra que jalonner l’avance ennemie. On a dit que les Ardennes sont peu perméables aux chars. C’est stupide, s’agissant d’une simple traversée sans combat.

Mon étude conclut que, 48 heures après le début de l’offensive, les allemands peuvent avoir un groupement blindé de plusieurs divisions sur la Meuse de Sedan et passer à l’attaque de notre position défensive.

Mon travail personnel ( 2ème Bureau ) est alors terminé. Il passe entre les mains de mon homologue du 3ème Bureau ( commandant G… ), quelle n’est pas ma stupéfaction de constater qu’il a conclu qu’il faudrait plusieurs semaines aux Allemands pour mettre en place la quantité d’artillerie ( G… est artilleur) nécessaire à rompre cette position.

C’est en contradiction formelle avec tout ce que le S.R. nous a appris sur les méthodes allemandes, dont on a constaté l’efficacité en Pologne. On connaît aussi la faiblesse de notre dispositif dans ce secteur. Mais le 3ème Bureau est plein de ses certitudes . C’est à peine si j’obtiens l’adjonction dans le rapport de l’expression ” sous réserve de la surprise technique “.

On connaît trop bien la suite.

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