Par M. Jean VANWELKENHUYZEN

Ce mois de mai, si riche en souvenirs, nous incite à piocher toujours davantage dans l’Histoire et plus particulièrement dans celle, si controversée, des événements qui ont précédé le désastre de mai 1940.

Cette fois, nous donnons la parole à M.VANWELKENHUYZEN, le distingué directeur du Centre belge de Recherches et d’Études historiques de la Deuxième Guerre Mondiale. Avec son autorisation, nous reproduisons ci-après des extraits de son étude récente sur l’attitude de la Belgique.

 

La haute compétence de l’auteur, la documentation unique dont les archives belges sont pourvues donnent à son étude une valeur exceptionnelle.

 

Nos camarades que les événements de 1939-1940 passionnent, pourront par comparaison avec les indications abondamment fournies sur ce sujet (1) se faire une opinion à la fois sur le comportement de la Belgique et des Pays-Bas, sur ce qu’il faut penser de l’attitude de l’un des chefs de l’Abwehr, le colonel OSTER, et plus généralement de l’opposition à HITLER.

 

PREMIÈRE ALERTE

L’histoire commence à Berlin le lundi 9 octobre 1939, au début de l’après-midi. Le vicomte Jacques DAVIGNON rentre à l’ambassade de Belgique. Devant le bâtiment de la Jägerstrasse l’ambassadeur aperçoit l’attaché militaire néerlandais qui fait nerveusement les cent pas. Le major Gijsbertus SAS a l’air préoccupé. Dès qu’il voit le diplomate belge, il se précipite à sa rencontre. Il lui dit sa contrariété. Il aurait voulu toucher le colonel George GOETHALS. Il a une communication importante à lui faire.

 

L’ambassadeur introduit l’officier dans son bureau et l’invite à lui confier l’objet de sa visite. SAS va droit au but. Il annonce qu’il tient de source sûre que l’état-major de l’armée allemande prépare une attaque de la Belgique. Il ne peut dévoiler l’identité de son informateur. Mais il a en lui la plus grande confiance. La Belgique court, à son avis, un péril immense.

 

Dès que GOETHALS arrive à l’ambassade, DAVIGNON lui fait part de ce qu’il vient d’apprendre. L’ambassadeur et l’attaché militaire confrontent leurs impressions. Ils n’ont pas besoin d’épiloguer beaucoup pour tomber d’accord que les autorités militaires belges doivent être averties immédiatement. Le colonel rédige aussitôt un télégramme et le chiffre. Son message parvient à Bruxelles à 18 heures. En voici le passage principal

« Attaché hollandais tient d’un ami allemand qu’il considère comme personne digne de foi très bien placée : une marche à travers la Belgique est en ce moment à l’étude au bureau du chef d’état-major général HALDER ; ce plan évite passage par la Hollande».

 

Qu’un allemand installé dans l’appareil de l’État trahisse à ce point paraît difficile à croire.

 

Qu’il s’agisse d’« intoxication » ou d’information exacte, ce que l’ami allemand de SAS a dit est de mauvais augure. Sans se prononcer sur le fond, l’ambassadeur de Belgique observe dans sa dépêche du 10 octobre :« Quoi qu’il en soit, un tel renseignement doit évidemment retenir notre sérieuse attention ».

 

OSTER CONTRE HITLER

La perplexité de Davignon et de Goethals augmenterait s’ils savaient d’où Sas tient ses renseignements. En effet, son informateur appartient a l’Abwehr !

 

Un des insoupçonnables paradoxes du IIIe  Reich est d’avoir à la tête de ses services secrets militaires un adversaire du régime.

 

Il est vrai que l’amiral Wilhelm Canaris ne s’est pas tourné immédiatement contre ses maîtres nazis. Au contraire, il a commencé par les servir avec enthousiasme. Il ne s’est distancé d’…

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