Il y a quarante-quatre ans, le Capitaine Léon Lheureux expirait au camp disciplinaire de Dora-Ellrich.
Dans la nuit du 11 au 12 mars 1944, le Capitaine Léon Lheureux et trois de ses équipiers étaient arrêtés par les Allemands, dans la Somme. La mission « JOIE » du T.R. Jeune était décapitée.
Le Capitaine Léon-Joseph Lheureux est né à Sanghin-en-Weppes, le 9 novembre 1913. Entré à l’Ecole Spéciale Militaire de Saint-Cyr, en 1935 il fait partie de la promotion « Maréchal Lyautey ». A sa sortie en 1937, il est affecté au 8° Zouaves à Mourmelon.
A la déclaration de la guerre, il est lieutenant et prend part, le 1°’septembre 1939 à l’offensive de Lorraine comme chef de section, de la 1° Compagnie.
Le 14 septembre, il reçoit son baptême du feu. Sa bravoure lui vaut sa première citation à l’ordre de la brigade.
Le 5 novembre 1939, il est muté à la 14° compagnie divisionnaire antichar de la 12° DI.; c’est avec elle qu’il fera la campagne des Flandres, de Bovesse en Belgique à Dunkerque, où il est fait prisonnier le 4 juin à 5 heures, après avoir été cité une seconde fois.
A 7 heures il s’évade. Il tente de gagner l’Angleterre dans un bateau de pêche. Repris vers 3 heures du matin le 5 juin, il est conduit au camp de Rexpoede où il reste les 5 et 6 juin.
En route vers Lille le 7, il s’échappe à Lomme le 8 vers 14 heures. Le 9 muni de vêtements civils, il gagne son village natal et y retrouve son père, maire de la commune. Il décide alors de gagner la zone libre.
Il parvient à Bourges le juillet et est affecté au 273° R.I. à Saint-Armand puis au 1° R.I. en poste à Blet.
Muté au Maroc fin décembre 1940, il est affecté au 40° R.T.M. où il reste comme instructeur jusqu’à fin 1942. En mars 1943, volontaire pour effectuer des missions de résistance en France, il est recruté par le Commandant Paillole et affecté au réseau T.R. Jeune que dirige cet autre héros qu’est le Capitaine Vellaud. Une mission prioritaire s’impose rétablir dans le Nord notre organisation de C.E. — Esprit ouvert, méthodique, Lheureux connaît bien la Région et accepte cette mission avec enthousiasme. Après un stage à Alger, puis en Angleterre, un avion le dépose en France avec un aspirant, un radio, deux postes et de faux papiers. C’est le 24 mai 1943.
Son commando a reçu le nom de « JOIE »; son champ d’action s’étend pratiquement de Paris à la citadelle d’Anvers. Chaque jour il frôle la mort. Les liaisons avec Alger étant difficiles, il sollicite avec insistance l’envoi d’un matériel nouveau plus puissant. Après des jours d’attente, le parachutage est prévu début mars 1944, trois jours après le message radio « Le nénuphar est une plante aquatique ».
Jusqu’au 8 mars, il attend vainement. Le 9 mars au soir, passent deux messages déconcertants « la grenouille est sur le nénuphar » et « le carnaval enverra deux amis à Joie » ; les mots ” nénuphar “cet ” joie ” prêtant à confusion, il en conclut que l’opération est fixée dans la nuit du 11 au 12 mars.
Arrivé vers 3 heures du matin au point prévu le calvaire de Maurepas, dans la Somme, ses trois équipiers et lui-même sont immédiatement cernés par les Allemands.
En réalité le message passa le dimanche 12 pour parachutage la nuit du 15 au 16. Victime d’une méprise, le Capitaine Lheureux a été trahi. Emprisonné à la citadelle d’Amiens, il n’y reste que quelques jours. Il est dirigé sur la prison de Fresnes et mis au secret. Il ne parlera jamais.
Quelques jours avant la libération de Paris, il part pour Buchenwald avec le sinistre convoi de 1.500 déportés politiques, sur lesquels les Allemands s’acharneront. Pas un seul ne reverra son pays.
Buchenwald avait un camp disciplinaire : Dora et Dora avait aussi un camp disciplinaire qui était Ellrich. C’est là que Léon Lheure…