2014 : année de grands anniversaires pour l’AASSDN

Editorial du Colonel Henri Debrun, Président de l’AASSDN

1) Anniversaire de l’Amicale : l’AASSDN a soixante ans !
Elle est officiellement née le 25 décembre 1953,
Date du Journal officiel qui publia sa déclaration en préfecture de police de Paris.
Le jour de Noël !… Cela ne saurait s’inventer.
Conçue par nos Anciens du Contre-espionnage, Paillole, Rivet, Navarre,
d’Alès, Gérar-Dubot et bien d’autres afin d’entretenir un lien de solidarité et
d’entraide entre ceux qui avaient lutté au sein de ce service et auprès des
familles de leurs camarades disparus mais aussi de faire reconnaître l’importance
du rôle qu’ils avaient joué dans la clandestinité au service de la France
et de faire respecter les actions qu’ils avaient menées pendant la guerre.

Elle s’appelait alors : “ Amicale des Anciens des SSM/TR ”
et prit corps le 27 février 1954 lors de son assemblée générale constituante.
Le Colonel Paul Paillole en fut élu Président national et le resta jusqu’en 2001.
Deux ans après, elle ouvrait ses rangs tout naturellement à ceux qui
avaient oeuvré au sein des SR Guerre, Air, Marine et s’appela en 1956 :
“ Amicale des Anciens des Services Spéciaux de la Défense Nationale ”
L’histoire de l’ASSDN commençait. 60 ans après, elle se poursuit. Grâce à
son souci d’adaptation au fil du temps, elle a désormais l’honneur d’être
reconnue comme l’expression associative de la Communauté du
Renseignement et des Opérations spéciales telles qu’elles sont à présent définies,
dans l’esprit légué par ses fondateurs et dans le respect des valeurs qui
lui sont chères et de l’histoire des Services Spéciaux dont elle est “ la gardienne
du temple ”.

Pour célébrer cet anniversaire, nul autre lieu que Ramatuelle, si liée à
l’ASSDN par cette histoire dont notre Mémorial à caractère national est “ la
Pierre de Mémoire ”, ne convenait et quoi de mieux que d’y tenir Congrès,
du 7 au 10 mai prochain ?

D’autant que 2014 est l’année d’autres anniversaires au retentissement
historique à l’évidence bien plus grand que l’ASSDN, membre du Monde
Combattant, se doit de célébrer également à sa mesure :

2) Le 60e anniversaire de la chute de Diên Biên Phu le 7 mai 1954
après deux mois de combats acharnés, prélude dramatique, mais dans l’honneur
de nos forces armées, de la fin de la guerre d’Indochine à laquelle nos
services apportèrent un concours encore trop méconnu. Nous le commémorerons
au Mémorial de Fréjus, sans oublier que cette fin de guerre lointaine pour la
métropole entraîna “ la Toussaint rouge ” en Algérie, début d’une autre
guerre.

3) Le 70e anniversaire du débarquement de Provence.
Nous commémorerons avec trois mois d’avance cette opération Dragoon en rappelant l’action
déterminante de nos services et de certains de nos réseaux, dont celui de
l’Abbé Lapouge récemment décédé, pour sa préparation, et, dans son exécution,
avec des détachements TR et SA auprès des grandes unités alliées et le
SRO de l’armée B commandée par le Général de Lattre de Tassigny.
Nous saluerons nos derniers Anciens de cette grande époque de la
Libération et ceux qui nous ont quittés. Nous leur rendrons hommage.

4) Le 70e anniversaire du débarquement de Normandie, l’opération Overlord
à laquelle nos services SR et CE participèrent, dans sa phase de préparation,
par un intense travail de recueil et de transmission de renseignements
et une contribution précieuse au fabuleux stratagème “ Fortitude ”,
comme dans son déroulement, grâce à l’accord conclu par le Commandant
Paillole et le Colonel Sheen, chef du G2 de l’État-major du Général
Eisenhower, avec des détachements TR et SA auprès des grandes unités
alliées et les BSM préinstallés.

L’ASSDN sera présente, avec sa délégation de Normandie animée par
Pierre Desjardins, Délégué régional et Jean-Claude Hamel, Délégué de la
Manche, aux commémorations en juin prochain.

5) Enfin le centenaire de la déclaration de la Première Guerre Mondiale.
Nous participerons bien sûr à sa célébration et découvrirons avec intérêt
certaines actions d’acquisition du renseignement.

En somme, une année riche de souvenirs, d’hommages et de découvertes aussi…




Les forces spéciales dans le livre Blanc de la Défense et de la Sécurité Nationale (2013)

Introduction de Gérald Arboit
Le Renseignement reste une priorité pour les concepteurs du Livre blanc. Le
Président de la République l’avait notamment rappelé lors du lancement des travaux
du Livre blanc le 13 juillet 2012. Pour François Hollande, il en va de “ la faculté de
notre pays de conserver sa liberté d’appréciation et de décision ”.
Cette appréciation des situations s’appuie sur des informations améliorées
recueillies à partir des renseignements humain, électromagnétique et image. Le rôle
central du renseignement reste dans la définition d’une stratégie de défense et de
sécurité nationale. Il relève depuis 2008 de la fonction stratégique “ connaissance et
anticipation ”.

Elle est mise en oeuvre par les six services de renseignement constitués depuis
2008 en communauté du renseignement. La gouvernance de cette dernière est organisée
autour du Coordonnateur National du Renseignement (CNR), tandis que l’académie
du renseignement, créée en 2010, contribue à l’émergence d’une culture
partagée au sein de la communauté française du renseignement. Dans le contexte
budgétaire contraint et dans un objectif de synergie et d’efficacité collective, la poursuite
de la mutualisation accrue des moyens techniques entre les services de renseignement
est confiée au CNR.

Le point fort de cette nouvelle lecture de la Défense et de la Sécurité nationale est
le renforcement de la gouvernance du renseignement, sous l’égide du CNR et l’impulsion
du Conseil National du Renseignement. La délégation parlementaire au renseignement
se voit confiée des compétences nouvelles, lui permettant de mieux
suivre l’ensemble de la dépense publique en matière de renseignement, mais aussi
d’exercer sa mission de contrôle de la politique gouvernementale dans ce domaine.
L’évolution des menaces et la prévention d’actes de terrorisme imposent un effort
prononcé sur le renseignement intérieur. Cible des attaques depuis l’affaire Mérah, la
coordination de la Direction Centrale du Renseignement Intérieur (DCRI) doit être
renforcée. Enfin, l’effort d’investissement décidé en 2008 se poursuit. Au-delà du
renseignement d’origine humaine dont l’importance est confirmée, les capacités
techniques de recueil, ainsi que de leurs moyens d’exploitation dans les cinq milieux
(espace extra-atmosphérique, air, cyberespace, terre en mer) seront améliorées. Pour
renforcer notre appréciation autonome des situations, les principaux efforts porteront
sur les composantes spatiales et aériennes, aussi bien pour l’imagerie que pour l’interception
électromagnétique, tant les drones que les capacités spatiales. La coordination
entre les projets militaires et les projets institutionnels à utilisation duale
(civile et militaire) doit être recherchée et la mutualisation à l’échelle européenne privilégiée.

 

LIVRE BLANC DE LA DÉFENSE ET DE LA SÉCURITÉ NATIONALE

Accorder la priorité au Renseignement
Le Livre blanc donne une portée nouvelle à la priorité accordée au
Renseignement. Celui-ci voit son rôle central réaffirmé, au-delà des seules nécessités
militaires ou strictement sécuritaires et au bénéfice des quatre autres fonctions
stratégiques. Sa gouvernance sera améliorée, en confortant le rôle du Coordonnateur
National du Renseignement placé auprès du Président de la République, en renforçant
les moyens du Parlement à travers la capacité de la Délégation parlementaire
d’exercer le contrôle de la politique du Gouvernement dans ce domaine, et en rendant
publique une stratégie nationale du Renseignement.

Le Livre blanc met l’accent sur l’importance des moyens à accorder au
Renseignement intérieur dans les années à venir. Il engage aussi un effort d’investissement
global majeur portant en particulier sur les composantes spatiales et aériennes
de l’imagerie et des écoutes électromagnétiques ; la diversification des capteurs,
avec particulièrement les drones, les avions légers d’observation et les charges
embarquées sur plateformes aériennes, navales ou terrestres ; les moyens consacrés
à la cyberdéfense ; les moyens techniques d’interception adaptés à la rapidité du
développement du numérique. En outre, afin de tirer le meilleur parti de ces équipements,
le Livre blanc établit un principe de mutualisation des moyens techniques les
plus coûteux entre les services de renseignement, sous la supervision du
Coordonnateur national.

Connaissance et anticipation : la priorité du renseignement
Le Renseignement est une priorité du Livre blanc, soulignée à plusieurs reprises
par le Président de la République, notamment lors du lancement des travaux du Livre
blanc le 13 juillet 2012 : “ ce qui est ici en cause, c’est la faculté de notre pays de
conserver sa liberté d’appréciation et de décision ”.
L’appréciation des situations s’appuie sur des informations complémentaires
recueillies à partir de trois origines : le renseignement humain, l’analyse des messages
détectés et des fréquences dans le spectre électromagnétique et le recueil
d’images (et de vidéos). Les six services de renseignement ont été constitués depuis
2008 en communauté du renseignement dont la gouvernance est organisée autour du
Coordonnateur National du Renseignement (CNR). L’académie du renseignement,
créée en 2010, a véritablement contribué à l’émergence d’une culture partagée au
sein de la communauté française du renseignement.

1 – Le rôle central du Renseignement dans la stratégie de défense et de sécurité
nationale.
Le Renseignement relève de la fonction stratégique “ connaissance et anticipation
” et conditionne l’engagement de la France. Il est une clé de l’autonomie stratégique
et de l’efficacité opérationnelle de nos capacités de protection, de dissuasion et
d’intervention.

2 – Le principe de mutualisation des moyens pour le Renseignement
La France entend poursuivre ses efforts afin d’acquérir les capacités de recueil et
d’exploitation nécessaires à l’autonomie d’appréciation des situations. Dans le
contexte budgétaire contraint et dans un objectif de synergie et d’efficacité collective,
une mutualisation accrue des moyens techniques entre les services de renseignement
sera recherchée. Elle sera appliquée aussi bien entre les services du Ministère de la
Défense qu’entre ceux des différents ministères. Elle sera suivie par le CNR.

3 – Le renforcement de la gouvernance du renseignement
Le Livre blanc de 2013 conforte le rôle du CNR dans l’animation de la communauté
du renseignement, dans la préparation des orientations arrêtées en conseil
national du renseignement, dans le suivi des activités et des grands programmes et
dans le domaine budgétaire. Une stratégie nationale du renseignement, préparée sous
l’égide du CNR, sera arrêtée en conseil national du renseignement ; les grandes
lignes en seront rendues publiques. Le rôle du Parlement sera accru, en dotant la
délégation parlementaire au renseignement de compétences nouvelles, d’une capacité
à suivre l’ensemble de la dépense publique en matière de renseignement, et en
lui conférant des compétences renforcées pour exercer sa mission de contrôle de la
politique gouvernementale dans ce domaine.

4 – Un effort particulier en faveur du Renseignement intérieur
L’évolution des menaces et la prévention d’actes de terrorisme imposent un effort
prononcé sur le Renseignement intérieur. La Direction Centrale du Renseignement
Intérieur (DCRI) sera renforcée, en particulier en ce qui concerne ses moyens
humains, et une meilleure coordination sera recherchée entre les services en charge
des missions de sécurité nationale.

5 – Un effort d’investissement majeur dans tous les domaines du Renseignement
L’effort de modernisation des ressources humaines propres au renseignement sera amplifié.
Au-delà du renseignement d’origine humaine dont l’importance est confirmée,
les capacités techniques de recueil, ainsi que de leurs moyens d’exploitation dans les
cinq milieux (espace extra-atmosphérique, air, cyberespace, terre et mer) seront améliorées.
Pour renforcer notre appréciation autonome des situations, les principaux
efforts porteront sur les composantes spatiales et aériennes, aussi bien pour l’imagerie
que pour l’interception électromagnétique, et tout particulièrement sur les
drones. Les capacités spatiales sont en effet indispensables pour identifier les
menaces balistiques potentielles, pour localiser et discriminer les risques des
menaces. La coordination entre les projets militaires et les projets institutionnels à
utilisation duale (civile et militaire) sera recherchée et la mutualisation à l’échelle
européenne privilégiée.

La France affiche ainsi sa volonté d’appliquer au renseignement
spatial une approche qui reposerait sur des interdépendances mutuelles avec ses
alliés européens ayant des capacités spatiales. Les opérations militaires récentes ont
rappelé l’importance des capacités aériennes qui doivent être pérennisées : drones de
moyenne altitude et longue endurance, drones tactiques d’observation, avions légers
d’observation et nacelles de reconnaissance de nouvelle génération. De même que
pour le domaine spatial, la mutualisation de la capacité à déployer et exploiter les
drones de surveillance sera proposée à nos partenaires européens. Les moyens consacrés
à la cyberdéfense seront renforcés afin d’être mieux en mesure d’identifier
l’origine des attaques informatiques et de pouvoir ainsi les contrer. Les moyens de
recueil sur les plate-formes terrestres et navales seront également pérennisés.

L’évolution des forces : le nouveau modèle d’armée

Les forces spéciales se sont imposées comme une capacité de premier plan dans toutes les
opérations récentes. Elles sont particulièrement adaptées aux besoins accrus de réaction
dans l’urgence, en souplesse et dans la profondeur d’un dispositif hostile ou complexe.
Leurs effectifs et leurs moyens de commandement seront renforcés, comme
leur capacité à se coordonner avec les services de renseignement. La dimension interarmées
du Commandement des Opérations Spéciales (COS) sera confortée.




1942 : L’opération FRANKTON

Au début du 2e trimestre de l’année 1942, Lord Selborne, Ministre de la Guerre
Économique, attira l’attention de Winston Churchill sur l’accroissement préoccupant
du trafic des navires allemands forceurs de blocus qui, malgré les pertes qui leur
étaient infligées par la Royal Navy et la RAF, déchargeaient à Bordeaux leurs cargaisons
de latex, de métaux rares et de produits tropicaux en provenance d’Extrême-
Orient, d’importance essentielle pour l’industrie de guerre du Reich et embarquaient
des machines-outils et des pièces destinées à l’industrie aéronautique livrées aux
usines d’armement japonaises.

Le Premier Ministre chargea Lord Louis Mountbatten, Commandant en Chef des
Opérations Combinées de préparer un plan d’intervention. Une opération amphibie
de grande envergure ayant été écartée d’emblée et Anthony Eden, Ministre des
Affaires Étrangères s’étant opposé au bombardement du Port par les avions de la
RAF, trop de vies humaines étant en jeu, la décision fut prise de recourir à une
attaque par des commandos contre les forceurs de blocus à quai au sein même du Port
Autonome de Bordeaux.

Cette mission allait être confiée à une unité spéciale du Corps des Royal Marines
le “ Royal Marines Boom Patrol Detachment ” constituée à l’initiative du Major
Herbert G. Hasler, surnommé “ Blondie ”, qui allait être désigné par Lord
Mountbatten comme commandant du commando. L’opération avait reçu le nom de
code (sans signification) de “ Frankton ”.

Sous couvert d’un entraînement de routine à la protection des installations portuaires,
le RMBPD composé de deux sections allait préparer dans le plus grand secret
une opération extrêmement risquée. A l’exception d’Hasler, aucun des membres du
commando ne sut la destination ni le but de la mission avant d’être embarqué à bord
du sous-marin.

Sélectionnés au sein de la 1re section, six équipages de deux hommes à bord de
six kayaks de mer (Cockle Mark II) mis au point par le Major Hasler et l’ingénieur
Goatley seraient mis à l’eau à proximité de l’embouchure de la Gironde. Ils remonteraient
le fleuve à la pagaie, se cachant de jour et naviguant au compas de nuit.

Après avoir identifié leurs cibles le long des quais, ils poseraient des mines “ limpets
” (arapèdes) à adhérence magnétique sous la ligne de flottaison des forceurs de
blocus allemands dont les services de renseignements anglais savaient à quelle date
ils seraient amarrés à quai à Bassens et à Bordeaux, sans qu’aucun membre de la
Résistance eut jamais su à quoi serviraient ou à qui étaient destinées les informations
recueillies et transmises aux services secrets à Londres.

Aucun recueil n’étant possible après l’attaque, ils redescendraient la Gironde en
kayak jusqu’à la hauteur de la ville de Blaye, saborderaient leurs bateaux et tenteraient
de rejoindre à pied la ville de Ruffec, distante de 160 km, d’où une filière
d’évasion britannique dépendant du M19 pourrait prendre en charge leur évasion
vers l’Espagne, avec le concours de Résistants français.

Personne n’avait été informé de leur mission ni à Bordeaux, ni à Ruffec.
Dans la soirée du 7 décembre 1942, le sous-marin britannique HMS, TUNA, sous
les ordres du Lieutenant Raikes, alors âgé de 28 ans, mit cinq kayaks à l’eau au large
de Montalivet. Dans l’ordre de mise à la mer :

  • Catfish (Poisson-chat) : Major Hasler (Chef du Commando), Marine William E.Sparks.
  • Cuttlefish (Seiche) : Lieutenant John MacKinnon (Commandant en second), Marine James Conway.
  • Crayfish (Écrevisse) : Corporal A. S. Laver, Marine W.N. Mills.
  • Chachalot (Cachalot) : Marine Ellery, Marine Fisher.
  • Coalfish (Morue noire) : Sergent Samuel Wallace, Marine Robert Ewart.
  • Conger (Congre) : Corporal George Sheard, Marine David Moffatt.

Le flanc déchiré au passage du panneau d’accès à la chambre des torpilles avant
du TUNA, où il avait été stocké durant la traversée, le Cachalot dut être rembarqué
avec son équipage. Peu après 20 heures, les cinq kayaks s’éloignèrent en formation,
sous le commandement du Major Hasler en direction de la Pointe de Grave.
Vers minuit, au franchissement du ressac très dangereux même par temps calme
sur les hauts-fonds au large du phare Saint-Nicolas, le kayak “ Coalfish ” chavira et
le contact fut perdu avec le Sergent Wallace et le Marine Ewart.
Une demi-heure plus tard, ce fut au tour du “ Conger ” (Caporal Sheard et
Marine Moffatt). Cette fois, les deux RM purent être repérés et après sabordage du
Conger, ils furent remorqués dans l’eau glaciale accrochés au “ Catfish ” (Hasler et
Sparks) et au “ Crayfish ” (Laver et Mills). La mission étant primordiale, Hasler dut
les abandonner au plus près du rivage après avoir passé la Pointe de Grave.

Les trois kayaks restants poursuivirent leur route portés par la marée montante
vers le Verdon. Ils furent obligés de prendre leurs distances pour passer entre le môle
et quatre bâtiments ennemis ancrés à quelques encablures. C’est à ce moment-là que
le contact fut perdu avec le “ Cuttlefish ” (Lieutenant MacKinnon et Marine
Conway).

Le jour se levait quand les deux derniers kayaks, “ Catfish ” et “ Crayfish ” trouvèrent
à la Pointe aux Oiseaux un abri où ils purent se dissimuler pour la journée dans
les roseaux bordant la rive, à proximité de Saint-Vivien-du-Médoc. Ils continuèrent
leur route durant la nuit du 8 au 9 vers le Port des Callonges, puis vers l’Ile-Cazeau
(nuit du 9 au 10) à la faveur de l’obscurité et portés par le courant de marée.

Le 11 décembre à l’aube ils trouvèrent enfin, sur la rive gauche du fleuve en face de
Bassens, un endroit pour se cacher, se reposer et préparer l’attaque. Dans la nuit du
11 au 12 décembre, les équipages des deux derniers kayaks s’engagèrent dans la dernière
phase de leur mission : le “ Catfish ” suivit la rive gauche jusqu’aux quais de
Bordeaux et réussit à fixer ses mines sur trois grands navires et un pétrolier à
l’amarre le long du quai ; le “ Crayfish ” traversa la Garonne vers Bassens et fixa
ses mines sur deux navires à l’amarrage.

Mission accomplie, entre minuit et une heure du matin le 12 décembre, les deux
équipages entamèrent leur repli. Ils se rejoignirent miraculeusement dans l’obscurité
au Sud de l’Ile-Cazeau. Portés par le courant, ils firent route ensemble, longeant la
rive droite du fleuve. A 1 500 m environ au nord de Blaye, les deux équipes se séparèrent
par mesure de prudence pour aborder à environ 400 m l’une de l’autre à la hauteur
de Saint-Genès-de-Blaye. Ils ne devaient jamais se revoir. Il était entre 3 h 30 et

4 heures du matin et il ne leur restait que 3 à 4 heures d’obscurité, quand ils entamèrent
leur repli à pied par des itinéraires différents, pour tenter d’atteindre Ruffec, à 160
km de leur point de débarquement.

A partir de 7 heures, les crayons retards mirent à feu successivement les mines
limpets. A Bassens, “ l’Alabama ” et le “ Portland ”, minés par Crayfish, furent gravement
endommagés. Attaqués par Catfish, Quai Carnot à Bordeaux, le “ Dresden ”,
le “ Tannenfels ” commencèrent à s’enfoncer le long des quais auxquels leurs
amarres les retenaient. Un 5e bateau, le pétrolier “ Cap Hadid ” prit feu. Les limpets
posées sur la coque d’un 6e navire, le “ Sperrbrecher n° 5 ” (patrouilleur allemand)
se détachèrent et explosèrent sur le fond sans dommage pour la cible. Les explosions
des mines se succédèrent de 7 heures jusqu’à la mi-journée causant la confusion et
le désordre chez l’ennemi.

La compagnie des pompiers du port autonome au sein de laquelle l’ingénieur
TPE Raymond Brard, responsable de la sécurité du port et fondateur du Club des
Girondins, avait placé une équipe de résistants, intervint immédiatement sous le
commandement du Commandant Paduch à la requête du HafenKommandant. C’est
au cours de leur intervention que les pompiers, inversant l’action des pompes mises
en batterie réussirent, sans être inquiétés, à aggraver la gîte des bâtiments les plus
atteints.

Hasler et Sparks, aidés au long de leur route par des Français courageux, comme
la famille Pasqueraud qui les hébergea une nuit à Napres entre Saint-Preuil et
Lignières, furent les seuls à atteindre Ruffec. Ils choisirent d’entrer au jugé, vers
13 h 30 le 18 décembre 1942, dans le restaurant “ La Toque Blanche ”, où ils eurent
la chance d’être accueillis par M. René Mandinaud, sa femme et ses soeurs, une
famille de Français patriotes. M. Mandinaud prit contact avec M. Jean Mariaud.
Ce dernier organisa le passage des deux fugitifs dans l’ex-zone libre après consultations
successives de M. Paille, ancien professeur en Angleterre, qui confirma leur
nationalité et de Mme Marthe Rullier qui alerta le passeur.

Le 19 décembre, Hasler et Sparks, furent conduits en camionnette par M. René
Flaud, boulanger, près de Benest, à proximité de la ligne de démarcation, toujours
gardée par les Allemands. M. Fernand Dumas, le passeur, les conduisit à la ferme
Marvaud où ils allaient être hébergés pendant 41 jours chez M. et Mme Armand
Dubreuille.

Ils auraient dû être remis dans les deux jours suivant leur arrivée à Marvaud à
Mary Lindell, alias “ Marie-Claire ”, Comtesse de Milleville par son mariage, qui
connaissait les Dubreuille. Marie-Claire était un agent du M19, organisation faisant
partie des Services Secrets britanniques, spécialisée dans l’aide à l’évasion et le rapatriement
des personnels militaires en Angleterre.

Grièvement blessée dans un accident, sans contact radio, elle ne put être jointe
par Armand Dubreuille qu’après plusieurs semaines de silence. Elle arriva enfin à
Marvaud et c’est son fils Maurice de Milleville, âgé de 18 ans qui accompagna les
deux fugitifs par le train de Roumazières à Lyon. Leur évasion se poursuivit jusqu’à
la frontière espagnole via Marseille et Perpignan. Arrivés en Espagne, les deux survivants
furent pris en charge par l’Ambassade à Madrid, d’où ils furent conduits à
Gibraltar. Hasler regagna l’Angleterre par avion le 3 avril 1943 et Bill Sparks fut
ensuite rapatrié par un transport de troupes.

Le Sergent Wallace et le Marine Ewart, capturés le 8 décembre 1942 au lever du
jour furent fusillés sur ordre de l’Amiral Julius Bachmann dans la nuit du 11 au 12
décembre après de longs interrogatoires sans avoir parlé. Leur exécution eut lieu au
château du Dehez (aujourd’hui Château Magnol) à Blanquefort.
Le corps du Caporal Sheard, probablement noyé dans la nuit du 7 au 8 décembre,
ne fut jamais retrouvé et celui de son coéquipier le Marine Moffatt fut découvert le
17 sur la plage de Bois-en-Ré.

Le Lieutenant MacKinnon et le Marine Conway, ayant poursuivi seuls leur route
sur la Gironde atteignirent l’Ile-Cazeau puis le Bec d’Ambès où leur embarcation
coula, après avoir éperonné un obstacle sous-marin. Ils se replièrent jusqu’à Cessac
où un couple de Français, M. et Mme Jaubert les hébergèrent trois jours. Après avoir
quitté leurs hôtes, ils cherchèrent à gagner l’Espagne. Capturés par la gendarmerie
française près de La Réole, le 18 décembre, ils furent remis aux autorités allemandes
qui les emmenèrent à Bordeaux.

Le repli de Laver et Mills s’acheva près de Montlieu-La Garde où ils furent
dénoncés, arrêtés par la gendarmerie qui les remit aux autorités d’occupation.
Enfermés à Bordeaux avec MacKinnon et Conway, puis transférés à Paris au début
de janvier, tous les quatre furent exécutés le 23 mars 1943.

Gardés en vie pendant trois mois, sans doute parce que les services de renseignement
allemands cherchaient à savoir par qui ils avaient été aidés durant leur repli, le
Caporal Laver RM, le Marine Mills, le Lieutenant MacKinnon RM et le Marine
Conway moururent sans avoir parlé.

L’exécution des six Royal Marines pris en uniforme, en application de la directive
secrète d’Hitler du 18 octobre 1942 concernant les commandos, constitue un
crime de guerre dont l’Amiral Raeder eut à répondre au procès de Nuremberg en
1946 et l’Amiral Bachmann au procès d’Hambourg en 1948.

En 1955, parut le livre de CE Lucas Phillips “ Cockleshell Heroes ” tiré à
250 000 exemplaires en Angleterre, traduit en français en 1956 sous le titre
“ Opération Coque de Noix ”. Le Lieutenant Colonel Hasler OBE DSO RM, apporta
sa collaboration à l’auteur qui eut accès à des sources fermées aux chercheurs.
Également en 1955, le film “ Cockleshell Heroes ” (version française :
“ Commando dans la Gironde ” sorti en 1956) produit par Warwick et distribué par
Columbia Pictures, d’après un scénario de Bryan Forbes et Richard Maibaum.
Tourné sur le Tage, mis en scène par José Ferrer qui interprétait le rôle d’Hasler, avec
Trevor Howard dans un rôle de fiction, le film avait bénéficié de l’appui technique
du Corps des Royal Marines. Malgré les libertés prises par les scénaristes avec la
vérité historique, au grand déplaisir du Major Hasler, “ Commando dans la
Gironde ” fabriqué dans la lignée des productions de films de guerre américains des
années 50 connut un succès commercial.

Une biographie remarquable du Colonel Hasler, décédé en 1987, par le Major
Ewen Southby Tailyour préfacée par SAR le Duc d’Edimbourg, retrace la carrière de
Blondie Hasler au sein du corps des Royal Marines, suivie après la guerre de celle
d’un très grand marin puisqu’il fut le fondateur des courses transatlantiques en solitaire
en 1960. Eric Tabarly qui participa à la seconde traversée devait devenir un de
ses proches amis.

Un ouvrage historique, “ Le Commando de l’impossible ” par François Boisnier
et Raymond Muelle, utilisant les archives anglaises, allemandes, françaises et les
derniers témoignages des rares survivants encore en vie et des contemporains de
l’opération Frankton, est paru en 2003 édité par Trésor du Patrimoine.
En 2002, un reportage de Jonathan Marland a été réalisé pour Meridian TV,
chaîne privée britannique, comportant une longue interview de Bill Sparks sur les
lieux de son évasion.

En 2004 deux films sur l’Opération Frankton ont été tournés :

  • En France : “ Des ombres dans la nuit – Opération Frankton ” durée 52 minutes,
    réalisé par Ramon Maranon diffusé par FR 3 Aquitaine.
  • En Angleterre et en France : “ Frankton Shadows ”, durée 30 minutes,
    réalisé par Tom Keene diffusé par la BBC.

Le souvenir des héros de l’Opération Frankton est commémoré chaque année en
France, notamment à Bordeaux, à Blanquefort, à la Pointe de Grave, à Saint-
Georges-de-Didonne et à Ruffec.




Extrait du Bulletin : Services spéciaux français (3) – première guerre mondiale

Par le Colonel ALLEMAND

( Conférence faite le 18 mai 1985 à Compiègne )

LES RESULTATS

I/, Au point de vue S.R.

Dans ce domaine, les résultats sont fonction de 4 opérations :

1 – rechercher le renseignement

2 – le trouver

3 – le transmettre

4- y faire croire (par le commandement), cette dernière opération, essentiellement psychologique, étant parfois la plus difficile.

 

Il n’est pas étonnant qu’il y ait eu des « loupés », voire des « bavures » provenant du « ratage » d’une de ces opérations.

 

– Ainsi l’offensive allemande du chemin des Dames de mai 1918, détectée par deux agents. Le premier, la connaissant depuis près d’une semaine, mais n’en appréciant pas toute l’importance, ne se pressa pas pour transmettre l’information. Elle ne fut livrée à l’officier traitant que la veille au soir. Le second, un Alsacien (très « bleu, blanc, rouge » d’après son officier traitant, le Commandant Andlauer) avait été incorporé dans l’armée allemande en 1914. Blessé, il fut versé au service des alcools du G.Q.G., place idéale pour renseigner, notamment, sur les intentions de l’ennemi ; il avait comme agent de liaison sa maîtresse qui apportait les renseignements à un pharmacien de BALE, rue Meyer, boîte aux lettres du poste S.R. de BELFORT. Or, quand notre agent eut connaissance du renseignement relatif au chemin des Dames, sa « Dame » recevait son mari arrivé en permission. Malheureux hasard… grandeurs… et servitudes d’un S.R.

 

– Notons, à propos de VERDUN, que Ladoux,  dès janvier 1916 harcela, littéralement, le commandement au sujet des concentrations allemandes qui avaient été repérées au nord et à l’est de cette place forte ; en vain. Il en avisa le Colonel Driant qui toucha le gouvernement. Ladoux, sans relâche, en parlait au P.C. de Joffre à Chantilly où, régulièrement, il lui était répondu : « Laissez tomber cette histoire ! vos papiers, à ce sujet, sont mis régulièrement au panier. »

 

– Réaction analogue au sujet d’un renseignement concernant l’attaque allemande devant aboutir au désastre de Caporetto. Ladoux avait eu ce renseignement d’une informatrice italienne épouse d’un banquier allemand : il en informa le G.Q.G. qui croyait qu’il s’agissait de concentrations contre 1′ armée d’Orient. Il en avisa le Ministre Painleve, puis, de guerre lasse, en saisit l’attaché militaire italien à Paris qui parvint à toucher le généralissime italien Cadorna ; celui-ci déclara qu’une telle entreprise était « hors de la logique ». On connaît la suite…

 

– Rappelons l’histoire du « Vengeur » annonçant le projet d’invasion allemande de la Belgique. En 1914, notre haut commandement ignorait probablement ce renseignement parce que non « passé en consigne », et aussi parce que « manquant de logique »…

 

Dans l’ensemble, le bilan S.R. fut positif. En 1914, bien qu’on ait accusé le S.R. français d’avoir commis des erreurs sur l’appréciation quantitative globale de l’armée allemande, il avait dénombré les grandes unités allemandes et dressé un ordre de bataille sérieux.

 

Par la suite, il continua à renseigner, surtout, sur les mouvements des grandes unités et l’évolution du matériel ennemi ; son honneur y était engagé. Quatre ans durant, il tailla des croupières à l’adversaire mettant à son actif des succès importants dont nous donnons ci-après quelques exemples :

 

– Au moment critique de la Marne, le S.R. apprend le prélèvement de 2 corps d’armée allemands en Alsace décidé par le Haut Commandement adverse en vue de leur transfert sur le front de l’…




Bibliographie : Ouvrages présentés – Commentaires IX

Encyclopédies :

Services et Renseignement

Périodes 1900-34 :

Services et Renseignement

Périodes 1935-45 :

(1) Acteurs, (2)
Services et Renseignement
,
(3) Résistance

Périodes après 1945 :

(1) Services, (2) Renseignement

Thèmes spécifiques :

(1) Services, (2) Autres

Autres thèmes  :
et ouvrages divers
Etudes & Perspectives  :

voir rubrique spécifique

 




Extrait du Bulletin : Yougoslavie livrée communisme 43 – 45




Bibliographie : Ouvrages présentés – Commentaires VII

ALVAREZ David J.

SECRET MESSAGES: CODEBREAKING AND AMERICAN DIPLOMACY, 1930-1945
(Hardcover – New Edition)

Alvarez (politics, Saint Mary’s College of California) traces one chapter in the history of cryptology. Drawing upon military and intelligence archives, interviews with retired and active cryptanalysts, and recently declassified cryptologic documents, he examines the contributions that the U.S. Army’s top-secret Signal Intelligence Service (SIS) made to the war effort before and after World War II. Alvarez traces the development of the SIS and describes the code-breaking process. He also considers the relationship between intelligence and foreign policy. Annotation c. Book News, Inc., Portland, OR (booknews.com)

“Provides an unparalleled glimpse into Army codebreaking in World War II.”–John Prados, author of Combined Fleet Decoded: The Secret History of American Intelligence and the Japanese Navy in World War II
“Imaginatively written, thoroughly documented, and brilliantly comprehensive. Fills a significant gap in intelligence literature.”–Carl Boyd, author of Hitler’s Japanese Confidant: General Oshima Hiroshi and MAGIC Intelligence, 1941-1945
“An important and pioneering work that will be essential reading for any student of cryptology, or of intelligence during the Second World War.”–John Ferris, author of Intelligence and Strategy

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BEN-ISRAEL Isaac

Philosophie du renseignement : Logique et morale de l’espionnage
Editions de l’Eclat – 2004

Le Renseignement militaire est une institution relativement récente, dont l’objet est de clarifier la réalité grâce à la collecte d’informations et à leur estimation.

Bien que l’espionnage compte parmi les métiers les plus anciens du monde, les premiers organismes institutionnels du Renseignement ne sont apparus qu…




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     De 1940 à 1942
au 23, Promenade de la plage à Marseille
se trouve la villa Eole.

Cette villa sera détruite par les Allemands en 1943

 

Avec l’appui de M. Préaud, directeur du génie rural au ministère de l’Agriculture, le commandant Paul Paillole sous une fausse identité et comme pseudo Perrier Philippe, né le 8, novembre 1904 à Blida (Algérie), crée l’Entreprise des Travaux Ruraux.

Cette entreprise abrite en réalité l’état-major du Contre-espionnage clandestin sous l’appellation « Cambronne ». elle va s’installer jusqu’en novembre 1942 dans la villa Eole à Marseille.

 

 

Au PC Cambrone 1942 – Marseille : montage Photo, ci- dessus, on peut y voir : Verneuil, Guiraud, Challan-Bellval, Paul Paillole, Trottin, Garnier, Roger Corvée, Giboulot. Ne les oublions pas.

 

 

 

 

par Pierre de Villemarest

L’une des plus remarquables opérations de désinformation de la dernière guerre explique pourquoi et comment Londres aussi bien que Washington ont été dupés au point de préférer Tito au Général Mihaïlovic, et donc de livrer la Yougoslavie au communisme.

Au début de l’année 1943, tandis que Tito vient de passer cinq mois à s’entendre avec le Commandement allemand en Yougoslavie occupée, et alors que les 141.000 Tchetniks du Général Mihaïlovic passé dès mars 1941 dans le maquis avec 25.000 hommes font dérailler des trains, sauter des dépôts de munitions et ont sauvé plus de 400 aviateurs alliés, d’étranges mutations bouleversent les missions anglo-américaines dans les Balkans.

 

Tous les rapports envoyés à Bari, Alger, Londres, Washington attribuent désormais ces hauts faits aux forces du futur Maréchal Tito. Mihaïlovic avait jusqu’alors reçu 5.000 t d’armement. Les titistes, qui comptent à peine 60.000 hommes en reçoivent en 20 mois 76.000 t. Les occidentaux entendent dire que Mihaïlovic a passé des arrangements avec la Wehrmacht. Bill Donovan lui-même s’étonne de ce revirement. Il ne sait pas que les officiers envoyés par lui pour enquêter sur place, Mansfield et Seitz, ne peu­vent s’entretenir avec Mihaïlovic qu’en présence de l’officier britannique William Hudson, pro-titiste avoué, et qu’Hudson est seul habilité à transmettre (ou non) leurs rapports au GQG interallié…

Donovan ne sait pas et ne l’apprendra que des années après que le major américain Louis Huot est acquis à Tito, dont il assure ” qu’il ne prépare absolument pas une révolution communiste ” ni qu’avant 1941 Louis Huot écrivait dans le ” Chicago Tribune ” que le combat anti-fasciste exigeait de privilégier les communistes “. Alors que Moscou n’avait pas encore été agressé par Berlin ! Donovan ne saura qu’avec trois mois de retard que depuis Bari, sans rendre compte à ses supérieurs et en complicité avec deux britanniques, William Hudson et Fitzroy Maclean, Huot a organisé une navette de 14 bateaux de pêche qui, jour et nuit, ravitaille en armements les titistes, dont 400 ont été délégués sur la côte de l’Adriatique pour réceptionner cette aide.

Tito est si content qu’il fera don un peu plus tard à Fitzroy Maclean d’une luxueuse villa dans l’Ile de Korcula. Le journaliste britannique Atherton, qu’écoutait volontiers Donovan depuis 1941, car il parlait le serbe et le croate a été assassiné en avril 1942, par des agents communs de Tito et de Staline… Comment tout cela est-il possible ?

 

Les taupes aux leviers de commande

C’est tout simplement que Moscou a activé des taupes infiltrées de longue date au Département d’État américain, au Foreign Office, dans l’OSS, dans le commandement du S.O.E. britannique, dans l’Office of War Information, à la B.B.C. Et souvent très haut dans la hiérarchie.

– On n’a récemment découvert que John Cairncross (décédé le 8/10/1995) était le 5e homme du réseau Philby. Où est-il en 1943 ? Il supervise la section balkans des ” Services ” britanniques ! Qui a-t-il pris pour second : James Klugman, originaire comme lui du réseau soviétique né à Cambridge. Leur traitant s’appelle ” Vadim “. C’est-à-dire Anatoli Gorsky, etc… Notre liste s’étend à une dizaine de noms de gens basés à Bari ou sur place, près de Tito. L’un des rares anglais non affilié s’appelle Michael Lees. Il a publié nombre de révélations sur cette affaire en 1997 (The rape of Serbia, Harcourt, Brace, Jovanovic, Londres). Son livre a de suite disparu de la vente…

– L’opération n’aurait pas si bien réussi s’il n’en avait ét…




Histoire : Les Services français 1939-1945 (SR Terre)

Articles parus dans les Bulletin N° 43 et 44

 

Le S.R. TERRE

Au moment où un peu partout sont célébrées les grandes dates de là récente Histoire de France, il nous a paru nécessaire de rappeler à nos adhérents l’oeuvre accomplie par les Services Spéciaux de la Défense Nationale et, particulièrement, par les S.R. « Terre », « Air », « Marine »,
De nombreux Bulletins précédents ont consacré au C.E. et à la S.M. de longues pages et nous ne reviendrons pas, du moins pour l’instant, sur l’action (les Services de Sécurité Militaire et des T.R. au cours de la dernière Guerre Mondiale.

Nous commençons donc aujourd’hui par la publication d’un travail effectué par le Colonel SIMONEAU et qui porte sur le Service de Renseignements de l’Armée de Terre et son Réseau clandestin « Kléber ».

LE S.R. DE L’ARMEE DE TERRE

Le souci du renseignement a toujours hanté les Chefs d’Etat. Sous l’Ancien Régime, les Rois de France ou leurs Premiers Ministres ont toujours eu un cabinet noir, et ont employé à des missions spéciales précises, des personnages dont la petite histoire surtout a conté les aventures plus ou moins romancées.
Ce n’est que sous le Premier Empire et pour des fins aussi bien opérationnelles que politiques, que le besoin d’une organisation se fit sentir.
Le Baron VIGNON reçut en effet mission de créer et de mettre en oeuvre un Service secret chargé de la recherche et de la centralisation du renseignement, l’Empereur se réservant personnellement l’interprétation et l’exploitation.
De 1814 à 1870 on reprit les errements antérieurs, mais en présence, du danger que constituait le Reich allemand, et dans un but préventif on créa en 1873 au 2ème Bureau de l’E.M.A., une section de recherche qui, avec des fortunes diverses répondit à ce que le haut commandement de l’Armée française en espérait, et qui par la suite fut appelée couramment le « S.R. ».

Lors de l’entrée en guerre de 1914 le S.R. comptait, face à l’Allemagne trois postes installés respectivement à Mézières, Nancy et Belfort, mais ce dernier mieux placé à l’aile du dispositif des Armées, absorba les moyens des deux autres, et renseigna constamment le commandement sur le potentiel de guerre du Reich, et sur les activités de ses grandes unités au-delà des fronts de contact.
La victoire de 1918, la création de la S.D.N., les conférences de désarmement, la limitation des forces allemandes à une Reichwher de cent mille hommes, l’activité des commissions de contrôle, tout cela diminua considérablement l’audience que le S.R. avait su acquérir pendant les hostilités.
Il fallut l’avènement d’HITLER à la tête du Troisième Reich, et la création de l’Axe pour qu’en face du nouveau danger, on se décidât à donner au S.R. des moyens mieux adaptés à la situation.

1939- 1940

L’Anschluss de l’Autriche, l’affaire des Sudètes, l’occupation totale de la Tchécoslovaquie, les préparatifs face à la Pologne, la construction de la ligne Siefried, qui s’inscrivaient dans le temps avec le triplement du nombre des grandes unités, la création d’une force offensive de Trois Corps d’Armée (XlVe, XVe, XVIe) groupant les divisions motorisées, mécanisées et blindées, accrue par la mise sur pied de deux C.A. en Autriche et un en Tchécoslovaquie furent suivis de près et signalés, dès les premiers indices, dans les délais les plus courts par le S.R. qui au 1er septembre…




Biographie : Général Guy SCHLESSER

Général Guy SCHLESSER

En 1914, Guy Schlesser entre à Saint-Cyr, Promotion « La Grande Revanche », mais connaîtra de suite la guerre qu’il va faire dans l’infanterie ; blessé, il se porte volontaire pour servir dans l’aviation.

 

En 1918, à l’âge de 22 ans, il est capitaine et chevalier de la Légion d’honneur. Il devra néanmoins suivre à l’école spéciale Militaire de Saint-Cyr, le stage qu’il n’a pu effectuer en 1914. A l’issue de celui-ci, il choisira la Cavalerie, avec laquelle il fera campagne en Syrie dans un régiment de spahis.

 

En 1934, il servira au 11ème Cuirassiers, puis sera instructeur dans des écoles d’élèves officiers.

 

En 1936, à l’issue de son temps de commandement, il sera affecté aux Services Spéciaux de l’Armée, 2 bis avenue de Tourville. Après un rapide passage à la Section Allemande du SR, il devient le chef du Service de Centralisation du renseignement (SCR) c’est à dire la branche ” Contre-espionnage ” ( avec comme adjoint, le capitaine Paul Paillole).

 

De 1939 à 1942, il commande le 31ème Régiment de Dragons avec lequel il combat pendant la campagne de France. Blessé, fait prisonnier, il s’évade en juin 1940 et est nommé commandant du 2ème Régiment de Dragons à Auch. Régiment qui sera une pépinière de cadres pour la Résistance.

Peu de jours après l’invasion de la « Zone Libre » il décide de passer avec un grand nombres de ses officiers, en Afrique du Nord. Passant par l’Espagne où il sera comme beaucoup, détenu un temps au camp de Miranda del Ebro.

( L’étendard du régiment sera sauvé et acheminé jusqu’à Alger par le capitaine de Neucheze, grâce à une mission TR et au sous-marin Casabianca ).

 

En 1944, Reformant le 2ème Dragon en Algérie, il combattra ensuite avec la première Armée du Général de Lattre de Tassigny et se distinguera à Autun, puis avec le CC4 ( Combat Command ) de la 5ème DB qu’il commande, dans la prise de Belfort et le 2 février 1945, dans celle de Colmar.

 

Après la victoire, il commande successivement : l’École Spéciale Militaire Interarmes, installée à Coëtquidan, puis la Division territoriale d’Alger, la 5ème Division Blindée en Allemagne, et après avoir été Chef du Cabinet du Ministre de la Défense Nationale, le corps d’Armée de Fribourg.


En 1955, il siège au Conseil Supérieur de la Guerre.
 

 

Le Général de Corps d’Armée Guy Schlesser

 est décédé le 14 février 1970, il est inhumé au cimetière de Ladhof à Colmar.

 

 

 

   

 

 

Encyclopédies :

Services et Renseignement

Périodes 1900-34 :

Services et Renseignement

Périodes 1935-45 :

(1) Acteurs, (2)
Services et Renseignement
,
(3) Résistance

Périodes après 1945 :

(1) Services, (2) Renseignement

Thèmes spécifiques :

(1) Services, (2) Autres

Autres thèmes  :
et ouvrages divers
Etudes & Perspectives  :

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BERGOT Erwan

LE DOSSIER ROUGE

Services secrets contre FLN – GRASSET – 1976

L’Algérie brûle. Pendant que paras et légionnaires se battent dans les djebels, les services spéciaux français reçoivent l’ordre d’attaquer le F.L.N. à l’étranger.

Des bateaux chargés de munitions explosent dans les ports de Hambourg et de Tanger, ou sont arraisonnés en haute mer. En Suisse, en Allemagne, en Espagne des chefs F.L.N. sont abattus par des tireurs d’élite. Des trafiquants d’armes sautent à bord de voitures piégées. Des commandos sillonnent les pistes de Tunisie et du Maroc, harcèlent les camps d’entraînement des fellaghas.

Ce dossier rouge des opérations militaires clandestines de la guerre d’Algérie est enfin ouvert par Erwan Bergot, ancien commando du 11ème Choc et du Service Action.

Abondant en révélations, relatant des épisodes d’une violence souvent terrifiante, ce livre est un exceptionnel roman d’espionnage vécu.

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BERGOT Erwan

LES HÉROS OUBLIES

Services secrets contre Viêt-Minh – GRASSET

“Le 9 mars 1945, par un coup de force fulgurant, les Japonais massacrent les garnisons françaises d’Indochine. Une poignée de parachutistes des services secrets de la France Libre survivent au carnage. Retranchés dans les vertigineuses montagnes du Nord-Laos, ces quelques hommes affamés et en loques, oubliés de tous, décident de poursuivre seuls le combat.

Fresque saisissante de combats d’une violence à nulle autre pareille, éclairage fascinant de la face cachée de la tragédie indochinoise, l’ouvrage d’Erwan Bergot est d’autant plus attachant qu’il rompt avec le: clichés des habituels récits de guerre.”