Une lecon d’Histoire par Paul Leistenschneider, compagon de la liberation à la jeunesse

Notre camarade Paul Leistenschneider, alias «Carré» dans la résistance, lance un appel à la jeunesse pour que dans l’euphorie des manifestations qui célèbrent la Victoire sur les nazis, nul n’oublie les leçons de l’Histoire et en particulier les effets néfastes des politiques d’abandons comme des traités générateurs de conflits ethniques et nationaux.

Nul n’était plus qualifié que «Carré» pour donner ces conseils de vigilance. Entré dans la Résistance dès l’Armistice, il fut le précieux collaborateur de notre regretté ami le Colonel Simoneau à la tête depuis septembre 1940 de l’antenne S.R. du réseau Kléber à Vichy.

Après avoir rejoint Londres, il fut désigné en 1943 par le Général De Gaulle comme Délégué Militaire Régional (D.M.R.) à Montpellier et Toulouse. Son activité intense dans ces régions devait le rendre suspect à la Gestapo et le contraindre à changer de secteur.

Affecté à Lyon en avril 1944 aux côtés de Bourges-Maunoury, il accomplit avec autorité et souplesse une œuvre d’unification des groupes de résistance de la Région Rhône-Alpes. Son sang- froid autant que son sens politique pesèrent d’un poids décisif dans l’heureuse libération de Lyon en septembre 1944 en liaison avec les grandes unités américaines et françaises.

Fidèle adhérent de notre association, Paul Leistenschneider a toujours maintenu des liens précieux d’amitié avec nos camarades et spécialement avec ceux de Lorraine et d’Alsace.

___________________

Nous venons de vivre le cinquantenaire des débarquements en y associant dans la dignité nos alliés avec qui, un an plus tard, l’armée russe ayant pris Berlin, nous avons obtenu après de dures batailles la capitulation allemande. Et ce 14 juillet nous avons tenu à tendre à notre voisin la main du pardon. L’ampleur des cérémonies et la joie que tous nous avons ressentie à ce souvenir et à celui du Général De Gaulle descendant les Champs Elysées, ne doivent toutefois pas nous endormir ou nous faire oublier ni le calvaire vécu avant la Libération ni ses causes. Ce fut d’abord une déroute, sans comparaison dans notre histoire. Après environ un mois de combat effectif, l’ennemi arrivait à Paris en faisant 1.800.000 prisonniers. Des millions de réfugiés sur les routes mélangés aux militaires en retraite et parfois bombardés par l’aviation italienne, le Gouvernement, ne disposant plus de réserve, demanda à déposer les armes. Ce spectacle, du jamais vu, la surprise passée, déchaîna la grande colère du peuple trompé : un Président du Conseil avait encore annoncé après Narvik «Nous vaincrons parce que nous sommes les plus forts.»

Cette colère se dirigea autant contre le gouvernement de Front Populaire sorti des élections de 1936 que contre la majorité parlementaire modérée précédente, au pouvoir depuis 1933 (arrivée d’Hitler).

Si les uns avaient ramené la durée du travail de 48 à 40 heures alors qu’Hitler faisait travailler jusqu’à 62 heures certaines usines d’armement, les autres avaient permis à Hitler de déchirer toutes les clauses militaires du Traité de Versailles en lui permettant de remplacer une armée de 100.000 hommes composée de professionnels engagés pour douze ans par une armée nationale avec ses divisions blindées et une puissante aviation. Songez qu’en mars 1936, à la veille des élections donc, on le laissa occuper militairement la rive gauche du Rhin. Ce furent ces fautes que Vichy sut habilement exploiter. Je me souviens encore de certaines phrases du Maréchal Pétain : «Français, je hais ces mensonges qui vous ont fait tant de mal», ou «Français, vous n’avez pas de mémoire», ou cette autre du ministère de la propagande : « Peux-tu être plus Français que lui». Heureusement qu’en 1940 il n’a pas voulu ou n’a pas pu appeler les Français à voter. Il y aurait trouvé la légitimité qu’il a en vain cherchée. Et ce ne fut que le début du calvaire. Nous vîmes un Maréchal de France aller à Montoire le 24 octobre 1940 pour offrir sa collaboration à son vainqueur. Collaboration qui, la Russie n’était pas encore en guerre, ne pouvait être dirigée que contre l’ancien allié qui continuait à se battre. En se rendant à Montoire le Maréchal avait sans doute espéré s’en tirer par la cession de l’Alsace-Lorraine comme en 1871, mais sans avoir rien obtenu la collaboration continua. Collaboration qui pour le Français moyen se traduisit par les privations quotidiennes et qui alla parfois jusqu’à la guerre civile quand la milice attaqua les maquis. Les fautes antérieures à la déclaration de guerre, donc génératrices de la défaite, ont deux traits communs:

— elles étaient politiques et c’est un militaire qui paya doublement : d’abord Montoire, qui a dû quand même être douloureux pour le vainqueur de Verdun, puis la condamnation qui frappa l’homme dont l’âge n’avait pas encore éteint toutes les ambitions;

— les responsables de ces fautes politiques ont eu le temps de disparaître, mais tous étaient animés du même esprit de facilité: flatter l’électeur ou du moins ne pas gêner sa tranquillité, malgré tous les avertissements qu’Hitler nous avait prodigués. Sans doute pour des raisons de politique intérieure, la propagande de Vichy ne remonta pas plus loin dans le passé. La cause profonde de notre défaite résidait dans le Traité de Paix de Saint Germain-en-Laye du 10 septembre 1919 qui démolit l’Empire des Habsbourg. Une Autriche non viable, car à l’époque on ne vivait pas du seul tourisme, se laissa attirer par l’Allemagne hitlérienne. Les Sudètes mécontents comme les Slovaques des Tchèques majoritaires, n’auraient pas été attirés par Hitler. Au contraire, peut-être à l’époque où l’Allemagne souffrait de sept millions de chômeurs, la Bavière aurait pu être attirée par l’Autriche, catholique comme elle.

Mais si la cause initiale de la défaite a été dans ce Traité de Paix, il n’en demeure pas moins vrai que tout aurait pu être réparé si on n’avait pas permis à Hitler de réoccuper militairement la rive gauche du Rhin, c’est-à-dire de lui donner la possibilité de construire la ligne Siegfried en face la ligne Maginot. Et d’éviter ainsi, en 1939 du moins, la guerre sur les deux fronts. Pour ne pas laisser les jeunes générations sur l’idée familière que tout finit toujours par s’arranger, il est bon de rappeler les années douloureuses qui ont précédé la Libération, sinon c’est encourager encore une politique de facilité qui aboutit à la lâcheté pour finir par la catastrophe.

Catastrophe qui aujourd’hui, les données géographiques ayant changé, pourrait ne plus être une invasion militaire mais un désastre économique et social. Toutes ces erreurs génératrices du désastre, unique dans notre histoire, le Général De Gaulle les avait vécues. Aussi un changement fondamental dans notre Constitution lui parut indispensable. Ce fut l’œuvre à laquelle il s’attacha pour l’avenir de la France.

Mais nous avons appris depuis que les institutions sont inséparables des hommes auxquels le pouvoir est confié. C’est pourquoi je crois nécessaire de rappeler périodiquement à la jeunesse les circonstances qui avaient amené le Général à modifier nos institutions. Si non, les hommes étant toujours des hommes, la tentation de la facilité l’emportera.




René Bousquet : le livre de Yves Cazaux (1995)

Yves Cazaux, ancien Préfet, ancien Président de la Société des Gens de Lettres de France et de la Société de l’Histoire de France, est un homme courageux et de grand cœur.

C’est mon ami, après avoir été depuis 1939, notre collaborateur au sein du 2° Bureau (S.C.R.), puis un honorable correspondant permanent et efficace dans les postes administratifs de plus en plus importants qu’il occupa pendant l’occupation, notamment à Paris aux côtés de cet autre grand Préfet que fut Guy Perrier de Feral.

Notre camarade du réseau SSM/F/TR, le Commandant Mayeur, en poste à Paris en 1943, n’eut pas de meilleur et de plus sûr auxiliaire qu’Yves Cazaux dans ses missions de préparation de la libération de la capitale et de liaisons avec l’Organisation de Résistance de l’Armée (O.R.A.).

Nous lui devons estime et reconnaissance pour cet engagement total et désintéressé à nos côtés, en toutes circonstances.

Je n’en suis que plus à l’aise pour dire ce que je pense de son livre sur René Bousquet. Certes, c’est l’expression enthousiaste d’une vieille amitié, nourrie aux meilleures sources. Yves Cazaux est de bonne foi dans ses convictions, sincère dans ses sentiments à l’égard d’un homme dont nul ne conteste l’intelligence et le charme.

Oserai-je écrire, tant j’ai grande considération pour la pureté de sa pensée, que son jugement est faussé lorsqu’il s’exprime sur des actes que pour ma part je qualifie de trahison et que ma fonction avait le devoir de dénoncer.

Tolérer, faciliter l’entrée et l’action en zone libre de commandos de l’Abwehr et du S.D. pour neutraliser les réseaux de renseignements au moment où des événements décisifs (débarquements alliés du 8 novembre 1942 en A.F.N.) vont changer le cours de la guerre. C’est trahir.

Dénoncer l’une de nos plus précieuse source de renseignements sur l’ennemi (source K) en décembre 1942 au moment où les alliés et notre armée d’A.F.N. ont les pires difficultés pour contenir la Wehrmacht aux confins algéro-marocains, c’est trahir.

Etre de la sorte responsable de l’arrestation, de la déportation et de la mort de Français patriotes, c’est trahir.

Je comprends que, meurtri dans sa confiance et son affection pour Bousquet, Yves Cazaux dans son livre généreux, cherche des excuses, avance des explications, affirme ses certitudes et démontre les bons côtés d’une carrière dont je n’ai jamais nié les difficultés et certains aspects positifs.

Hélas, mon cher Cazaux, il n’y a pas de gestes compensatoires pour la trahison, surtout lorsqu’elle est le fait d’un grand commis de l’Etat dont la fonction est précisément de la réprimer.

Des milliers de “lampistes” ont payé de leur vie ce crime contre la Nation. Je déplore le geste de ce fou qui nous a privés en 1993 de confronter ces accusations avec les arguments de Bousquet et de faire éclater au grand jour la Vérité et la Justice.

Je n’en demeure pas moins plein d’admiration pour le sérieux et la documentation de ce livre. Plein d’admiration aussi pour l’émouvante démonstration de fidélité, d’amitié et de caractère qu’il dégage.




René Bousquet : le livre de P Froment (1994)

Par le Colonel Paul PAILLOLE

Une vie et un procès riches en enseignements.

«C’est un livre sérieux et honnête)), ainsi François Mitterrand appréciait « Une Jeunesse Française » (Editions Fayard) au lendemain de la parution de l’ouvrage que Pierre Pean lui consacre. Je peux en dire autant du livre de Pascale Froment qui, entre autres révélations sur la vie publique et privée de René Bousquet, apporte de nouvelles lumières sur ses relations privilégiées avec le chef de l’Etat. Mais là n’est pas mon propos.

Le 8 juin 1992, l’ancien Secrétaire d’Etat à la police de Vichy était abattu dans son domicile parisien. L’action publique tendant à déférer René Bousquet devant la cour d’Assises pour crimes contre l’humanité était éteinte.

Sa responsabilité dans le domaine de la Défense Nationale qui fut le nôtre, ne l’est pas. Le 23 juin 1949, le crime «d’intelligence avec l’ennemi» n’ayant pas été retenu contre lui, Bousquet était condamné par la Haute Cour à la peine dérisoire de cinq ans de dégradation nationale dont il était, aux applaudissements de la foule (?), aussitôt relevé par la même juridiction.

Pascale Froment a le mérite d’analyser scrupuleusement l’instruction, le déroulement et la conclusion de cet étrange procès.

Dans le «ras-le-bol» général qui, quatre ans après la libération, pesait lourdement sur les derniers procès de l’épuration, René Bousquet a pu user de multiples relations, mettre en avant des actes de résistance (?) et bénéficier de la faiblesse d’une accusation pourtant révélatrice d’une intelligence avec l’ennemi que devait confirmer quarante ans plus tard, le dépouillement des archives allemandes saisies à Koblentz (1).

Je fus, en fait, le seul témoin à charge. Je dénonçais les effets dévastateurs de l’intrusion en zone libre, à la veille du débarquement allié en A.F.N. le 8 novembre 1942, des équipes du S.D. et de l’Abwehr, guidées et secondées par des policiers français mis à leur disposition par le Secrétaire Général pour la police. Dans cette phase cruciale de l’évolution du conflit, anglais et américains allaient être ainsi frustrés d’informations sur les réactions de la Wehrmacht, tandis que de valeureux patriotes étaient arrêtés, livrés à l’ennemi et déportés avec le concours des policiers français de Bousquet.

Que pouvait peser ma seule voix d’officier à la retraite, représentant isolé de réseaux de résistance et de renseignements issus d’une armée vaincue, dans ce prétoire engorgé de voyeurs, face à des jurés, ignorants pour la plupart des drames de l’occupation, indifférents à la notion de Défense Nationale et souvent de tendances politiques proches de celles de Bousquet…

Ainsi la Haute Cour l’acquittait. Je connais des dizaines de lampistes qui allèrent au poteau pour moins que cela… Le livre de Pascale Froment abonde en détails révélateurs d’une personnalité ambiguë, évoluant avec désinvolture au fil des temps dans une société toujours plus permissive, j’en retiens essentiellement, pour ma part, les pages d’où émergent avec quelques tares fondamentales de cette société, l’indifférence d’une élite à la notion de Défense et de Trahison.

(1) Rapport de Himmler à Hitler du 26 décembre 1942 sur l’arrestation de notre réseau d’écoutes sur le câble de la Wermacht Paris-Berlin, à la suite de la dénonciation spontanée de Bousquet à Oberg, chef de la police allemande en France.




1940-1945 : L’origine de L’OSS et son rôle dans le debarquement en France

Voici un ouvrage enfin réédité qu’il importe de LIRE, RELIRE, POSSEDER et D’OFFRIR : OSS, la guerre secrète en France de Fabrizio Calvi

Commentaire du Colonel Paul Paillole :

Voici un sujet qu’on pouvait croire épuisé par les spécialistes. Réseaux de la France Libre, Intelligence Service, Services Spéciaux Soviétiques, ont livré leurs secrets au cours de la dernière décennie. Cette fois, des rapports confidentiels d’une valeur historique inestimable, extraits d’un fonds de près de 100 m3 de documents archivés au Pentagone ou déposés aux Archives Nationales Américaines, ont été mis à la disposition de Fabrizio Calvi, enquêteur pour T.F.1 et Antenne 2, journaliste, historien, spécialiste des « Annales de l’Espionnage » (Hachette).

On découvre ici le rôle essentiel joué par l’O.S.S., l’ancêtre de la C.I.A., dans la préparation du débarquement d’Afrique du Nord, de Normandie, de Provence ou dans la conduite des opérations ultérieures au coeur de l’Allemagne. On apprend comment les Américains, dont l’inexpérience en matière de Services Secrets était totale, comblèrent leur retard avec une rapidité remarquable en s’appuyant tout particulièrement sur les Services Spéciaux (S.R. et C.E.) de l’Armée Française.

En effet, ces derniers, ignorant l’armistice, poursuivaient le combat — de zone libre d’abord, puis d’Alger en 1942 — avec le S.R.O. de la Première Armée Française en 1944, et, plus singulièrement, sans discontinuer dès juin 1940, à partir de Berne en Suisse, d’où opéraient le Colonel Pourchot, Attaché Militaire Adjoint, et son principal chef de Réseau, le Capitaine Meyer .

Qui mieux que les Américains pouvaient effectivement exploiter la « production », la « fourniture » du Service de Renseignement et de Contre-espionnage Français?

Pour Gilles Perrault, auteur de L’Orchestre Rouge, non suspect de complaisance à l’égard des Américains, « c’est un pan d’Histoire ignoré que l’auteur nous révèle. Pour tous ceux que passionnent les enjeux de la Seconde Guerre Mondiale, ce livre est indispensable. »

Cinquante ans après la fin du dernier conflit mondial, la nature des rapports entre les Services Secrets Américains et les composantes civiles et militaires de la Résistance restaient un des non-dits de l’Histoire de la Libération de la France. Lacune à présent comblée




A propos de “L’Homme des services secrets”: temoignages

De notre ami Joseph Challan-Belval, ancien de T.R. et du ” Jouet des Flots ” (avec le Lieutenant de Vaisseau Le Henaff), déporté. Extrait d’une lettre au Colonel Paillole ” J’ai bien reçu le dernier bulletin ; c’est toujours avec un grand intérêt que je le lis. Vous avez bien fait de résumer ce qui a été l’action des services spéciaux de 1940 à 1942; c’est toujours assez difficile à faire comprendre à ceux qui ne l’ont pas vécu. Je me rappelle encore parfaitement le jour de décembre 1940 où vous êtes revenu à la villa Eole après l’arrestation de S. . Je ne vous ai jamais revu dans une telle indignation, vous étiez blême de colère! “…

De notre ami Henri Castex ” J’ai bien reçu avec plaisir, comme toujours, le dernier bulletin de l’amicale. J’ai lu avec beaucoup d’intérêt votre article ” la confusion des genres “. Vous avez hautement raison de rappeler l’action du Colonel Rivet, soutenue par le Général Weygand en faveur de la création au sein de l’Armée de l’armistice, du service des ” Menées antinationales “. Le B.M.A. est toujours critiqué par certains résistants. C’est pour cela que j’estime que notre bulletin devrait être largement diffusé. Le plus grand nombre ignore l’action du réseau T.R. contre les infiltrations des services secrets allemands. Très peu savent que jusqu’à la dissolution de l’Armée de l’armistice des agents allemands ont été exécutés en zone libre.

De notre amie Yvonne Dantoine, à l’origine de l’évasion du Capitaine de Neucheze. Lettre adressée le 5 janvier 1996 au Colonel Paillole: “Je vais vous raconter l’évasion des deux internées que j’avais mission de soigner dans un pavillon du Val-de-Grâce, deux internées par les Allemands.

A l’époque, j’avais une jolie voix et en chantant, j’ai attiré vers moi les trois sentinelles allemandes, armées de fusils et de grenades. Elles ont donc quitté leur poste qui consistait à surveiller leurs prisonnières. Durant ce laps de temps, celles-ci ont coupé les barbelés et selon mes indications, se sont sauvées. Une des deux, Loulou Bichareil a accroché ses longs cheveux au fil de fer barbelé, ce dont elle a souffert très longtemps.

Il y avait aussi au Val-de-Grâce, un pavillon situé dans le jardin, occupé par des internées sous surveillance d’Allemands. Longtemps après l’évasion, j’ai donc prévenu ceux-ci qu’il manquait deux internées, peut-être étaient-elles à la radio? Le chef, un Prussien, est venu et a demandé: — A quelle heure, l’infirmière a pris son service? La sentinelle a répondu 2 heures (14 h.). Mlle Facq, une troisième internée qui ne s’est pas sauvée, craignant que l’on ne prenne sa mère en otage, ce qui est déjà arrivé dans sa famille, parlait allemand, me l’a répété. C’est ce qui m’a sauvé.

Or, c’était faux, j’étais rentrée à 2 h. moins 20. Entre temps, il y a eu échange de sentinelles. Bref les coupables n’ont pas été punies. Les non coupables ont été envoyés en Russie, paraît-il…

Quelques jours après, j’étais convoquée au pavillon par le Commandant de la Gestapo. Il est venu m’ ‘interroger, accompagné de deux sous-officiers qui me regardaient dans les yeux. — A quelle heure, avez-vous pris votre service? J’étais très calme, moi qui ne sais pas mentir, on a dans la vie parfois des grâces d’état… J’ai dit 2 heures. Je n’ai pas bronché, ai soutenu leur regard. J’ai pensé à ma mère qui n’avait que moi et que j’adorais. — Bon, vous resterez à notre disposition.

Mais ce n’est pas tout, donnant sur ce pavillon, il y avait un hôtel. Une femme, d’un certain âge se trouvait dans un fauteuil roulant, elle était infirme, elle m’a vue. Elle a envoyé un homme au poste de garde de l’hôpital disant ” l’infirmière est complice de l’évasion “. Or, heureusement pour moi, le poste était gardé par un sous- officier français, un breton, très patriote qui m’a prévenue.

Vraiment, quelle chose horrible d’être dénoncée par des Français! Heureusement, il n’est pas allé trouver les Allemands. Mais le chef des soldats allemands me disait: — Vous êtes complice, vous irez en camp. A la libération de Paris, le Capitaine de Corbie (cousin germain du Général de Gaulle, hospitalisé au Val, de retour de camp des prisonniers) voulait que nous allions dans cet hôtel trouver les coupables. Je ne me suis pas vengée!

P.S. : Ah ! J’avais chanté un air de “La Veuve Joyeuse “… “Viens dans mon joli pavillon “…

De notre ami Georges Ribollet, à propos de Pierre Hannequin, décédé le 5 juillet 1995. ” Pierre Hannequin, mon opérateur radio, au cours de ma première mission en France occupée. Nous étions plusieurs camarades réunis depuis longtemps. Nous étions partis d’Alger sur l’Angleterre, à bord d’un bateau, compris dans ceux qui transportaient les prisonniers de l’Armée Von Arnim (Tunisie – Mai 1943).

Il y avait le capitaine Vellaud, les lieutenants Heusch et Boffy, Pierre Hannequin et moi-même. Nous avons gagné Liverpool, puis Londres.

Après l’instruction fort intéressante des Anglais, Vellaud et Heusch furent parachutés en France une vingtaine de jours avant les autres. Ils nous reçurent, Pierre Hannequin et moi le 17 juillet 1943 à La Roche-Vineuse, située à l’ouest de Macon.

Pierre Hannequin, repéré sur les ondes à Lyon, partit sur mon ordre à Paris et renvoya son message du ” Lancaster “, rue du Berri où je l’avais entraîné. C’était un hôtel rempli d’Allemands et j’exécutais les conseils des Anglais quand tout semblait aller au plus mal. En quelques minutes le message partit sur Londres ” …




A propos de l’Homme des services secrets” (3)

L’HOMME DES SERVICES SECRETS ” RÉCOMPENSÉ

Le prix Louis Marin, décerné chaque année par l’Association des Écrivains Combattants, vient d’être attribué au Colonel Paillole pour son livre ” L’Homme des Services Secrets “. Ce prix lui sera remis dans les salons du Sénat le jeudi 18 avril prochain en présence de M. René Monory, Président du Sénat et de M. Pierre Pasquini, Ministre des Anciens Combattants et Victimes de Guerre. L’A.A.S.S.D.N. prie son Président national d’accepter ses bien vives et affectueuses félicitations.

A propos de ” L’HOMME DES SERVICES SECRETS “

A l’initiative de notre ami Raymond Grange que l’A.A.S.S.D.N. remercie vivement, le livre du Colonel Paillole ” L’Homme des Services Secrets ” a fait l’objet du rapport ci-après de l’inspection Générale d’Histoire du Ministère de l’Education Nationale.

Ce rapport précède une insertion dans une revue adressée à tous les services et aux bibliothèques du Ministère.

” Sous forme de dialogue, ce livre retrace l’existence du Colonel Paul Paillole qui anima pendant 10 ans de 1935 à 1945 les services du contre-espionnage (section allemande). Depuis 1899, les militaires n’avaient gardé que la responsabilité de la documentation extérieure, avec des moyens réduits et sous une apparence discrète au 2 bis de l’avenue de Tourville. Il revint à Paillole de faire face à l’offensive des armes secrètes du 3° Reich, essentiellement l’Abwehr de l’amiral Canaris. Après l’armistice, il continua l’action contre un ennemi renforcé par les agents du S.D. (en fait la Gestapo et les S.S.) en contact étroit avec les services anglais, puis américains. Il passa à Alger à la fin de 1942, réorganisant ses réseaux en métropole et assurant la sécurité militaire des unités françaises mises sur pied en A.F.N., fusionnant enfin ses services avec ceux du B.C.R.A. sous l’autorité de J. Soustelle à la veille du débarquement. A la fin de 1944, il quitta la direction du renseignement militaire après dix ans de combat efficace contre des adversaires particulièrement aguerris. Témoignage important pour l’histoire du renseignement français avant et pendant la guerre (avant la période de la D.G.E.R., puis du S.D.E.C.E. et de l’actuelle D.G.S.E.), le livre de Paul Paillole aborde deux points particulièrement révélateurs. D’abord le rôle joué par un agent d’exceptionnelle valeur, Hans-Thilo Schmidt, dit ” Asche “, frère du Général Rudolf Schmidt qui commanda un corps puis une armée de panzer en France et en Russie ; ” Asche ” permit de gagner six mois dans le décryptage par les Anglais du système Enigma. D’autre part le cursus de Paillole qui se caractérise par son maintien dans la mouvance de l’Armée de l’armistice (l’obédience de Vichy) jusqu’en novembre 1942, ce qui n’empêche une lutte sans merci contre les nazis (dont une quarantaine d’agents furent exécutés) avant comme après le débarquement allié en A.F.N.: donc une résistance effective et efficace mais qui ralliée tardivement au gaullisme, a été un peu oubliée par les historiens. On notera que ce sont les services de Paillole qui furent en partie à l’origine du passage à Londres de F. Mitterrand “.




A propos de “L’homme des services secrets” (2)

publication de ce livre ne manque pas de susciter des réactions enthousiastes, des commentaires élogieux et des souvenirs émus.

Ainsi des extraits de presse et témoignages:

De ” l’Écrivain Combattant “ juillet 1995 sous la signature du Général Compagnon: « …Les jugements, toujours pondérés mais incisifs du Colonel Paillole, sur cette époque trouble de l’avant-guerre et de la guerre sont remarquables. Ils donnent une appréciation exacte de l’ambiguïté du moment que les historiens modernes ont parfois du mal à appréhender… »

De ” Libération du 29 juin 1995 “ sous la signature de Jean Guisnel: « …De ces succès, Paillole ne tire pas gloire. C’était le travail de ses hommes, Ils l’ont fait. Point. Il ne cache d’ailleurs pas non plus les échecs de son service, en particulier dans la lutte contre les efforts de la propagande allemande. Mais l’essentiel est que comme bien souvent, un chaînon aura manqué entre les agents français et le gouvernement: la confiance (…). Le jugement que Paillole porte sur ces affaires semble n’être que l’écho de propos tenus par les dirigeants actuels des services… Et Jean Guisnel conclut son article par cet amusant extrait du livre : … Fin 1943, à la demande d’Henri Frenay, ses services seront chargés d’acheminer François Mitterrand – alias Capitaine Monnier – d’Alger en Angleterre via Marrakech, au grand dépit des gaullistes qui ne portaient pas le futur Président de la République dans leur cœur… »

De la revue de ” La Critique Parisienne “ sous la signature de Jean Lisbonne …Tout est à lire dans ce livre qui fait penser â l’adage latin Quos Vuet Perdere Jupiter… Quand ceux de ma génération se souviennent, ils pensent qu’un philtre magique nous fermait les yeux (…). On comprend que la victoire survenue, Paillole a considéré que sa tâche était accomplie… De Henri Lafforgue: …J’ai mieux compris également la complexité des relations De Gaulle-Giraud et de leurs partisans. A ce propos, j’ai aimé l’éloge émouvant que vous faites du Général Giraud et qui correspond tout à fait à ce que j’avais entendu dire dans ma famille. J’ai apprécié aussi, l’image que vous donnez du Général de Gaulle, “avant de Gaulle “, si je puis m’exprimer ainsi. C’est-à-dire au moment où rien n’était gagné, où tout se jouait. Aujourd’hui où la partie est jouée, les hommes oublient trop souvent qu’il y eut un moment où les choses se firent et où nul ne connaissait l’issue…

De Madame G. Guibal, fille de G. Dobrouchkess: …Et pourtant nos travaux n’ont pas toujours été compris ni exploités comme ils auraient dû l’être. Contre les doutes des uns, la passivité des autres et l’arrivisme des derniers “arrivés” que de déceptions. Vous avez raison, Monsieur, de rappeler à notre souvenir les détournements et les sacrifices de ceux qui nous ont permis de vivre libres aujourd’hui. Il fallait le faire! Notre génération comprend encore le patriotisme. Mais les générations suivantes, lorsqu’elles ont su pour quels intérêts, trop souvent, déguisés en amour de la liberté, nous nous battions aussi, ont alors douté et ne voient que rarement l’utilité de se battre pour des potentats industriels qui trop souvent commercent entre eux, même en pleine guerre! Ces générations là sont allées trop loin dans leur scepticisme bien sûr. Un livre comme le vôtre contribue, en rétablissant des vérités, à ranimer des courages et je vous en remercie…

De Madame Marie-Noël Challan-Belval, fille de l’ancien adjoint T.R. (ingénieur agro), déporté à la suite du naufrage du “Jouet des Flots” du Lieutenant de Vaisseau Yves Le Henaff au large de Plogoff (il était avec Brossolette, Jouhaud, etc…): …Je tiens à vous remercier très sincèrement pour l’exemplaire de ” l’Homme des Services Secrets ” accompagné d’une très touchante dédicace faisant honneur à ce jeune agronome des années 38 (son père). Sans vous avoir jamais rencontré, vous avez toujours fait partie de mon univers familial. Dès mon enfance, votre nom était chargé d’une très grande aura..

Et de Madame Serr: …C’est avec passion que j’ai lu votre dernier livre sur les ” Services Secrets “. C’est avec beaucoup d’intérêt que j’ai lu “cette vérité” que beaucoup ont voulu camoufler et parfois dénigrer! J’ai revécu ces années de guerre et je suis fière que mon mari ait pu donner de son dévouement et de sa compétence, à Marseille, à vos côtés, dans ce service qu’il aimait tant, au risque de sa vie et de la nôtre, bien souvent. C’est un livre qui doit être répandu…




A propos du livre ” L’homme des services secrets” (1)

De l’abondant courrier reçu, trois lettres, parmi tant d’autres, traduisent l’intérêt autant que l’émotion suscités à la fois par la lecture du livre que par les propos tenus lors de l’émission de télévision ” Bouillon de Culture “.

« … Une de mes filles a eu l’heureuse initiative de m’offrir votre dernier livre. Comme tout le monde, j’ai eu la surprise d’apprendre beaucoup sur une période que je pensais déjà connaître pour l’avoir vécue dans la clandestinité. Votre passage à la télévision nous a passionnés. Votre confiance, votre jeunesse, voici des confidences qui ne se trouvent pas dans des ouvrages sur la guerre… Les pages que je viens de lire m’ont rappelé mon émotion quand après la libération j’ai reçu mon ” décret de naturalisation ” vous avouerai-je que j’ai pleuré ! et j’avais 23 ans…

« … Revenant au début de cette lettre, permettez-moi de vous dire mes félicitations sincères car vous avez su mettre l’accent sur le rôle de notre Maison, ses méthodes de recherches, ses sources exceptionnelles de renseignements. Vous avez su montrer une machine au nom et au fonctionnement mystérieux qui ont laissé rêveurs bien des téléspectateurs. Vous avez surtout et avec fermeté souligné les atermoiements et le laisser-aller de nos vieux gouvernants face à des informations de premier ordre qui commandaient une action sans délai. Le 5 mai au soir, les Français ont compris les conséquences d’une incroyable négligence, les raisons de la défaite de juin 1940. Vous avez eu le courage de proclamer publiquement la Vérité et j’en ressens personnellement un honneur comme germaniste, puisque j’étais pendant près de dix ans chargé des correspondances ” sympathiques ” avec notre célèbre fournisseur (H.E.). Je tenais, mon Colonel, à vous dire ce qui précède ; je vous dis aussi que vous m’avez fait chaud au cœur et que je suis certain que vos paroles ont été entendues et qu’elles seront retenues. Puissent-elles également inciter les historiens et en faire état dans une page de notre longue Histoire !…

«… J’espère qu’il rencontrera un grand succès car sa ” densité ” historique le mérite. Bien sûr, le rétablissement de cette ” sacrée vérité ” pour laquelle vous vous êtes battu, sans défaillance, pendant nombre d’années. Encore et surtout ce témoignage direct, non édulcoré pour quelle que raison que ce soit et surtout pas commerciale. Une tranche d’histoire si importante mais si mal connue, vécue et non plus ou moins rafistolée. Enfin, pour montrer aux français que les services spéciaux ont une place dans la société. Ce livre est un livre à relire, l’exposé est serein mais sans concession. Vous ne vous souvenez sans doute pas de ma dernière correspondance qui remonte maintenant à plus de dix ans et dans laquelle je regrettais d’une part, le peu d’enthousiasme de nos compatriotes pour ce genre de témoignage et d’autre part, le nombre trop faible de témoignages de cet ordre. C’est avec de tels ouvrages que l’histoire, notre histoire, passionnera les Français un peu plus. Que cela serve de leçon à nos sauveurs quotidiens et aux grands méritants auto-proclamés (d’hier, d’aujourd’hui et de demain) ».

Des nombreux commentaires parus dans la presse, il a paru utile de retenir :

De ” Télé Obs “ sous la signature de Georges Buis, qui signale : …Il monte alors un prodigieux réseau fondé sur la “pénétration” du réseau ennemi: l’Abwehr. Il le sauve dans le désordre de l’exode de 40 et le camoufle en “Travaux ruraux “… et conclut ce long article, intitulé : Les Secrets d’un Cyrard : …Il aura été jusqu’au bout un Saint-Cyrien, c’est-à-dire un anti-James Bond, et aura toujours misé sur le dévouement, la qualité humaine et les dossiers bien tenus qui sont ” les clés du renseignement “…

Du ” Monde “ où Jacques Isnard rappelle : …Dès mars 1940, le service de Paul Paillole avertit le gouvernement et le commandement que la Wehrmacht réunit des informations sur l’axe Sedan-Abbeville, par où s’engouffra l’invasion allemande après la percée des Ardennes. Nul n’en tiendra compte. Avec trois jours d’avance, le même service annonce l’entrée en guerre de l’Italie: le ministère des affaires étrangères préfère s’en remettre aux télégrammes apaisants de son ambassadeur à Rome. D’une manière générale, note le Colonel Paillole, les autorités ont “un mépris souverain “ pour le renseignement, car, entre elles et lui, il y a ” une accumulation d’échelons hiérarchiques ” qui dénature le renseignement et ” stérilise sa crédibilité “…

De ” Monde & Vie “ où Pierre de Villemarest souligne notamment : …L’appareil secret créé par Paillole est suffisamment implanté et rodé pour désormais servir les Alliés… Au point que Paul Paillole est le seul Français qui ait participé aux préparatifs du débarquement en Normandie puis en Méditerranée, auprès du commandement anglo-américain. Même de Gaulle n’en savait ni les lieux, ni le jour, ni l’heure. Au contraire de Paillole qui, avec ses réseaux apprenait aux Alliés qui et quoi serait en face d’eux : Wehrmacht ou services proprement nazis, collaborateurs réels et non pas supposés, etc… Cet ouvrage gênera ceux qui depuis 1945 ont réduit à deux camps le combat: d’un côté les gaullistes et les communistes, de l’autre les “ kollabos ” ou les ” neutres “. Les professionnels du renseignement et du contre-espionnage ont été eux, oubliés alors qu’ils étaient les seuls à même, comme l’a fait remarquer l’amiral Pierre Lacoste durant l’émission, par leur formation et leur connaissance de certaines techniques, de pénétrer le dispositif ennemi…

Du ” Figaro “ où dans son commentaire, Éric Roussel cite abondamment cet ouvrage en réponse aux questions que se pose quiconque s’intéresse à la fois à l’histoire de la seconde guerre mondiale et au monde du renseignement. …Mais, au-delà des anecdotes dont il fourmille et qui contribuent à faire mieux connaître l’histoire, souvent sous-évaluée, des services secrets français, l’intérêt majeur de ce livre est de donner au lecteur une précieuse mise en perspective. Aujourd’hui, et des controverses récentes l’ont encore montré, on a tendance à croire que le contexte réel de l’Allemagne hitlérienne était bien connu en France — surtout après la défaite de 1940. Or ce livre atteste précisément le contraire. “Quand je suis entré dans la maison en 1935, je connaissais bien entendu la situation de l’Allemagne, celle de l’Italie; c’était le moment où les Italiens s’appropriaient l’Ethiopie. Les méthodes des fascistes comme celle des hitlériens ne nous échappaient pas. Nous en avions conscience mais on n’imaginait pas que tout cela pouvait un jour déboucher sur le chaos que nous avons connu en 1939. Nous n’avions pas idée de l’ampleur du danger “. Dès 1933, Paul Paillole, confronté à la réalité, prit conscience du péril constitué par le IIIe Reich. En vain, avec ses collègues il tenta d’attirer l’attention sur l’ampleur du réarmement allemand, au moment de Munich, il plaida en faveur d’une intervention. Après la guerre, Edouard Daladier lui en donna acte. Pour autant ce n’est que tardivement qu’il sut ce qui se passait dans les camps nazis. “Quand nous avons eu connaissance du décret Nuit et brouillard au début de 1942, nous avons bien compris que le régime imposé à nos camarades arrêtés, serait extrêmement sévère. Nous avons commencé à nous poser des questions, mais, malgré tout, sans imaginer l’outrance dans la sauvagerie et la brutalité qui nous fut révélée deux ans plus tard “. On ne soulignera jamais assez combien avait été analysé légèrement Mein Kampf et les premières dispositions raciales prises par les nazis dès leur arrivée au pouvoir…




L’Homme des services secrets -Ouvrage P Paillole AG Minella

Sous ce titre, les Éditions Julliard publient en avril 1995, une série d’entretiens à bâtons rompus, entre un jeune auteur Alain-Gilles Minella et moi-même. C’est l’aboutissement d’une initiative de Régine Pernoud, écrivain et historienne qui consistait à retracer, sous forme d’entretiens les « trajectoires » de diverses personnalités et de confronter leurs souvenirs aux questions que peuvent se poser les générations actuelles. Ainsi ont été publiées par les Éditions Marne, en 1993, les « trajectoires » du R.P. Riquet et du Général Massu recueillies par Alain-Gilles Minella. D’autres devaient suivre.., dont la mienne.

Commencée en 1992 et achevée fin 1993, ma « trajectoire » ne put être publiée en raison des modifications de structure de la Société Marne. Le projet fut repris en 1994 par les Éditions Julliard.

Le manuscrit d’origine dut être allégé de certains passages trop personnels, pour donner à l’ensemble une tournure plus actuelle et plus proche de mes activités militaires et civiles, notamment dans les Services Spéciaux de l’Armée.

Ce n’est pas un ouvrage dans le genre de Services Spéciaux 1935- 1945 où je retraçais chronologiquement ma carrière de soldat durant cette période. C’est un survol de mon existence depuis mon enfance jusqu’aux termes de ma vie active dans une entreprise industrielle.

Ce sont mes réponses à des questions que je n’ai pas inspirées, posées par un garçon de bonne foi, désireux de savoir et de comprendre le parcours d’un homme dans les événements majeurs de l’Histoire contemporaine.

Il était normal qu’Alain-Gilles Minella m’interroge sur les révélations récentes du livre ” Une jeunesse française François Mitterrand ” (1), où l’auteur, Pierre Pean, évoque nos anciens Services et met mon nom en avant.

Je n’ai jamais répondu avec la langue de bois même si, parfois, les questions posées dénotaient une ignorance fondamentale de certaines réalités historiques ou une conception par trop romanesque, sinon caricaturale, des Services Spéciaux et de ceux qui les servent.

En définitive, je me suis prêté à cette initiative, convaincu qu’en toutes circonstances, il est bon de lutter contre la désinformation, de rappeler les servitudes militaires, mais aussi leurs grandeurs, de démontrer enfin que le Renseignement est à la base de notre Défense.

(1) Éditions Fayard.




Evolution de l’association – L’ouverture : jusqu’ou aller ?

Depuis plusieurs années nos Assemblées Générales se sont inquiétées de la survie de notre Association. Le problème du recrutement a été et demeure l’une de nos préoccupations majeures. Demain, c’est-à-dire à l’occasion de notre prochain Congrès du 12 au 15 mai 1988 à Bordeaux, nos adhérents seront saisis d’un projet de modifications de nos statuts afin de permettre l’ouverture de notre Amicale à des générations plus jeunes. Lesquelles et comment? C’est à cela qu’il faut réfléchir, c’est pour cela qu’il est donné ci-après quelques éléments de réflexion.

 

1° Notre origine et nos buts : Nous les retrouverons résumés sous la plume du Général L.RIVET, notre Patron de 1936 à 1944, à la fois sur la page de nos statuts et sur celle de notre Bulletin.

J’en reproduis quelques phrases essentielles

…« Nouvelle par la densité de son titre, riche de son contenu français… Dans la chaude communauté des Anciens des Services Spéciaux, il y aura moins de souffrances et plus de joie » …« Un passé riche de gloire et de services rendus au Pays. » Voilà les raisons de notre Association et les seules. …« L’A.A.S.S.D.N., association de qualité qui a pris figure de groupement pilote parmi ceux voués à des buts identiques »

 

2° Nos réalisations: Nous nous sommes efforcés depuis trente-cinq ans de rester fidèles à ces affirmations de base. …« Riches de notre contenu français » : Notre action nationale, dépouillée de toute coloration politique, a toujours défendu les intérêts et la grandeur de la France. Dans les grandes crises qui ont secoué notre Pays, nous avons soutenu ce que nous pensions conforme à l’idéal de Patrie qui a conduit tant des nôtres au sacrifice. Ainsi voulions-nous d’une façon ou d’une autre garder l’Algérie dans la France… Ainsi, plus récemment, avons-nous pris la défense des Services Spéciaux et de leurs collaborateurs dans les crises qui ont mis leur efficacité voire même leur existence en cause.

… « Un passé riche de gloire et de services rendus au Pays » Notre action morale n’a cessé de mettre en évidence cette réalité si souvent ignorée, contestée, parfois même tendancieusement déformée. Notre Mémorial de Ramatuelle est devenu le symbole national et respecté de l’histoire contemporaine des : « Services Spéciaux de la Défense Nationale. » Nos réunions nationales à Paris et en province ont fait connaître à l’opinion leur vrai visage. Des ouvrages de qualité, parfois couronnés de prix littéraires, ont largement diffusé et diffusent toujours en France et à l’étranger la Vérité sur ce que fut notre vieille Maison, ses mérites, ses réalisations et aussi ses faiblesses. Nos réactions devant les insultes, les oublis, les mensonges, s’imposent désormais à l’audience des médias, comme à celle des Français. Enfin, chaque fois que nous l’avons pu — pas assez souvent à notre gré, nous avons aidé nos camarades à faire reconnaître leurs titres et leurs mérites.

… « Moins de souffrances et plus de joie ». Notre action sociale demeure prioritaire. Nous lui consacrons l’essentiel de nos moyens financiers. En toutes circonstances, nous manifestons notre solidarité, notre présence auprès de ceux des nôtres qui sont dans la peine. A cet égard, on ne saurait trop remercier la vigilance de nos délégués et leur dévouement si désintéressé. Il reste pourtant que notre action sociale ne saurait être complète si elle négligeait l’aspect moral de notre mission. A cet égard, notre Bulletin trimestriel demeure le lien irremplaçable entre nous. Je n’oublie pas non plus le rôle humain de liaison joué en permanence avec tant de générosité et de gentillesse par nos secrétaires.

…« Groupement pilote », nous le sommes si j’en juge par les réactions amicales que suscite notre façon d’être auprès des Associations amies. Mais « groupement pilote » sous-entend l’idée que nous avons des devoirs pour l’avenir et sans doute un rôle dont il reste à définir les contours. C’est bien de cela qu’il s’agit désormais.

 

3° L’Avenir. Il est possible de l’envisager de deux façons:

a) Rester dans le statu quo, c’est-à-dire limiter rigoureusement notre recrutement à ceux qui ont appartenu aux Services Spéciaux de la Deuxième Guerre mondiale et à leurs ayant droit (enfants, parents, etc…) le Conseil d’Administration accordant quelques dérogations à cette règle. C’est sensiblement la situation actuelle. A plus ou moins long terme, elle voue notre Association à la dissolution.

b) Ouvrir notre Association aux Anciens des Services Spéciaux actuels, étant entendu que leur adhésion doit comporter l’engagement de veiller scrupuleusement au respect de notre Passé, de nos traditions et des principes de base qui ont présidé à la création de notre Association. C’est, en bref, les modifications que notre Conseil d’Administration envisage de soumettre à l’appréciation de nos adhérents