Par Pierre de VILLEMAREST
En mars et avril 1945, l’un des dirigeants de la division américaine des Services du Chiffre, le Général George A. Richer, qui dès 1944, avait conçu les moyens de s’emparer des spécialistes allemands de ce domaine, lorsque l’Allemagne serait envahie, met à exécution son plan. Ce sera l’opération Ticom, l’une des plus secrètes de l’histoire de la guerre puisque aujourd’hui seul un confrère américain a obtenu le droit d’en parler .
Il s’agit de découvrir les secrets allemands qui ont permis à Berlin de pénétrer les chiffres anglais et américains, d’empêcher qu’ils ne tombent durant la retraite allemande ” dans des mains non autorisées ” (sic), d’exploiter les techniques allemandes en la matière, de voir s’il y a des possibilités d’exploitation de leur système tandis que la guerre se poursuit contre le Japon…
Six équipes de chercheurs sont donc expédiées secrètement en Allemagne, à huit semaines de sa capitulation. Une opération extraordinaire qui permet la capture d’environ 200 techniciens de grades et fonctions divers. Le plus extraordinaire est que tout cela reste secret, – même Moscou l’ignore -, et que des commandos sont derrière ses armées qui convergent vers Berlin et l’Europe centrale et du sud-est et font la chasse.
Ils réussissent non seulement à rapatrier secrètement vers l’ouest ces techniciens mais aussi des machines à chiffrer et déchiffrer, le tout saisi dans la région d’Augsburg, d’Ulm, de Dresde et du sud de Munich.
Il s’agit, au sud de Munich, de la prise à Rosenheim, grâce aux indications des prisonniers, d’une machine extraordinaire récemment mise au point par les Allemands, qui permet de capter toutes les télécommunications de l’armée soviétiques, du Haut Commandement à ses bases avancées, désormais cantonnées dans ce qui devient l’Allemagne de l’Est, et aussi bien avec celles qui s’installent dans tous les pays de l’est européen.
A parti de la fin de l’été 1945, Washington ” lit ” tous les ordres de Moscou à ses responsables, de la Baltique à la Mer Noire.
Ce qui veut dire aujourd’hui qu’il faut revoir sous cet éclairage toute l’histoire de la période 1945-1948 à propos des rapports americano-soviétiques, et de l’attitude du Président Truman qui a pris la succession de Roosevelt. Truman, de fait, est convaincu du danger de croire que l’idylle de Roosevelt avec Staline va donner naissance à un Nouvel Ordre Mondial pacifique.
Recoupement récent : Henry Fournier-Foch vient de publier un ouvrage évoqué durant le Congrès de l’A.S.S.D.N. par notre ami Rioual : ” Tovaritch Capitaine Foch ” (La Table Ronde) demande les moyens de regagner à France après avoir rendu d’éminents services à l’offensive soviétique sur l’Oder, une fois évadé d’un camp de prisonniers allemands.
Joukov lui répond carrément (c’est le 9 mai 1945). la guerre n’est pas finie : ” Nous allons bientôt reprendre la lutte, rejeter les Anglais et les Américains à la mer… Nous irons jusqu’à Brest, chez toi. Tu viendras avec nous ! “. Personne n’imaginait cela en mai 1945, à l’Ouest. Sauf parmi ceux qui, grâce à la machine prise à Rosenheim allaient ” lire ” les ordres de Moscou sur tous les fronts.
Pourquoi la date butoir de 1948 ? Parce qu’un agent soviétique, William Weissband recruté par l’OSS en Égypte (où sa famille juive venue d’Odessa s’était réfugiée avant guerre) et qui parlait trois ou quatre langues, avait réussi à progresser dans l’appareil américain jusqu’à faire son nid au Chiffre, et avertit Moscou en 1948. L’État-major soviétique a, de suite évidemment modifié son système.
Mais pe…
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